La direction de la santé publique du Québec remet en question la campagne de vaccination contre la grippe saisonnière cette année, au point de la mettre sur la glace pour les prochains mois, a appris La Presse.

Les provinces tergiversent depuis quelques semaines déjà à savoir si elles doivent lancer deux campagnes de vaccination simultanément, l'une contre la grippe A (H1N1) et l'autre contre l'influenza saisonnière.

De nouvelles études menées au Canada, notamment au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique, donnent maintenant du poids à leur hésitation. Les études semblent montrer que le fait d'avoir été vacciné contre la grippe saisonnière augmente le risque de contracter la grippe A (H1N1).

Il s'agit toutefois de résultats préliminaires puisque les études n'ont pas encore franchi le cap de la validation aux fins de publication. Les chercheurs refusent d'ailleurs de faire part officiellement de leurs conclusions.

«Actuellement, c'est en évaluation par les pairs. Les autres scientifiques regardent nos données pour évaluer la qualité de la méthodologie. Tant qu'on n'a pas les résultats de cette évaluation, on ne peut pas parler des résultats», a indiqué le Dr Gaston De Serres, médecin épidémiologiste à l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), l'un des auteurs d'une étude.

«Aucun résultat ne peut être considéré comme concluant avant la fin du processus d'examens par les pairs», a-t-on par ailleurs indiqué à l'Agence de santé publique du Canada. D'autres études similaires menées ailleurs dans le monde n'ont d'ailleurs pas donné les mêmes résultats, ajoute-t-on.

Pour le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, les informations disponibles semblent toutefois suffisantes pour mettre la campagne de vaccination saisonnière sur la glace, du moins momentanément.

Selon ce qu'il a été possible d'apprendre, la campagne sera retardée pour laisser toute la place à la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1) qui doit débuter à la mi-novembre. Le directeur de la protection publique du Québec, le Dr Horacio Arruda, devrait en faire l'annonce en conférence de presse cet après-midi.

Hier, l'Ontario a pris une décision en ce sens, modifiant son calendrier de vaccination habituel.

Au Québec, plusieurs cliniques médicales annonçaient pourtant depuis quelques semaines déjà les dates de vaccination contre l'influenza saisonnière, principalement pour les personnes à risque, soit dans ce cas les personnes âgées, les malades chroniques et les jeunes enfants.

La décision de retarder la campagne habituelle automnale donnera le temps nécessaire aux experts de la santé publique pour étudier l'évolution du virus dans la société. La vaccination contre la grippe saisonnière pourrait ensuite débuter, au début de l'année prochaine probablement, explique le Dr Karl Weiss, microbiologiste et infectiologue à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.

Québec a pris une sage décision, croit-il. «Il faut probablement donner la priorité au virus H1N1 parce qu'on sait que c'est ce qui circule actuellement.»

Il est rare que deux virus de la grippe circulent en même temps, précise aussi le Dr Weiss. Lorsqu'une majorité de Québécois qui le souhaitent auront été vaccinés, les responsables de la santé publique pourraient peut-être envisager une vaccination contre la grippe saisonnière, d'autant plus qu'elle semble circuler plus tard depuis quelques années, apparaissant souvent en janvier.

Québec doit par ailleurs apporter d'autres précisions concernant la vaccination contre la grippe A (H1N1). À la suite d'un avis des experts de l'INSPQ, la santé publique devrait ainsi recommander aux femmes enceintes et aux jeunes enfants d'opter pour le vaccin sans adjuvant.

L'adjuvant est un produit ajouté au vaccin afin de stimuler une meilleure réponse immunitaire et produire plus de doses. Ce type de vaccin peut toutefois entraîner des effets secondaires et n'a pas été testé sur les deux groupes à risque.