L'écart de rémunération entre les médecins omnipraticiens et les spécialistes ne cesse de croître, au point où il atteindra 55,9% en 2009. Un facteur déterminant pour l'attrait de la médecine familiale au Québec.

C'est du moins les conclusions auxquelles en arrive la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) au terme d'une analyse comparative de la rémunération entre les médecins omnipraticiens et les médecins spécialistes, dévoilée dans le cadre de leur congrès syndical.

«On vit un problème majeur d'attractivité en médecine familiale. Les étudiants délaissent la médecine familiale, les chiffres sont là, et on le sait que la rémunération joue un rôle», a déclaré le président de la FMOQ, le Dr Louis Godin.

Pour endiguer la pénurie de médecins de famille au Québec, il est urgent de corriger ce problème, croit-il. Environ un Québécois sur quatre n'a pas de médecin de famille actuellement.

«Si rien n'est fait, le danger est que la médecine familiale sera de moins en moins attirante, il y aura de moins en moins de médecins de famille et de plus en plus de Québécois vont se chercher un médecin de famille. Pour le système de santé québécois, ce sera une catastrophe», a ajouté le Dr Godin.

Au cours des trois dernières années, 180 postes de résidence en médecine de famille ont d'ailleurs été laissés vacants par les étudiants, ce qui n'augure rien de bon pour les prochaines années. Cela représente 250 000 Québécois qui n'auront pas accès à un médecin de famille, a estimé le président de la FMOQ.

L'analyse est basée sur les données de la Régie de l'assurance maladie du Québec qui fait état de la rémunération des médecins dans le réseau public. Elle ne tient pas compte des revenus provenant du privé ou de la CSST.

En 2007, les deux fédérations (médecins spécialistes et omnipraticiens) ont par ailleurs conclu une entente-cadre avec le gouvernement concernant un rattrapage salarial avec les médecins des autres provinces, qui gagnent beaucoup plus. Un plan de redressement a été prévu. Les spécialistes ont alors fait des gains plus importants.

Au terme de cette entente-cadre, en 2009, la FMOQ prévoit donc que l'écart entre les omnipraticiens et les spécialistes sera de 55,7%. La rémunération des premiers atteindra en moyenne 230 161$ comparativement à 358 373$ pour les seconds. Mais ces données ne tiennent pas compte des frais de cabinets évalués à environ 35% pour les deux groupes de médecins.

Il y a 30 ans, l'écart de rémunération entre les omnipraticiens et les spécialistes était d'environ 20%. Un écart qui n'a cessé de croître depuis. «Nous avons fait des projections jusqu'en 2015. Si rien n'est fait, il y aurait en 2015 un écart de 62,6%, ce qui est considérable», a précisé le directeur des affaires économiques de la FMOQ et responsable de l'analyse, Denis Blanchette.

La FMOQ entend se servir de cette analyse dans le cadre des négociations avec le gouvernement en 2010 concernant la rémunération des médecins. Les omnipraticiens espèrent réduire l'écart avec les spécialistes à 20%. Une demande de 500 millions, estime le Dr Godin.

Si le ministre de la Santé, Yves Bolduc, veut atteindre son objectif de rééquilibrer à 50-50 la proportion de médecins spécialistes et omnipraticiens au Québec, il n'a pas le choix de tendre l'oreille, a ajouté le Dr Godin.

La médecine de famille est une priorité, a indiqué Marie-Ève Bédard, l'attachée de presse du ministre. «Conformément à cette priorité, le ministère démontre une certaine ouverture. Cependant, nous entrons dans une période de négociations salariales et cela ne se fera pas sur la place publique.»