Bien qu'inefficaces et dangereuses, les mesures de contrôle telles que l'isolement et la contention sont encore trop souvent utilisées dans les hôpitaux et les centres d'hébergement québécois. C'est du moins l'avis de 267 organismes de la province, qui demandent au ministre de la Santé et des Services sociaux, Yves Bolduc, de s'engager à éliminer totalement le recours à ces mesures controversées.

«La violence, ce n'est jamais thérapeutique», souligne Doris Provencher, directrice générale de L'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec (AGIDD-SMQ). Et violence il y a: chaque année, on compte en moyenne trois décès par asphyxie lié à l'usage d'une contention. Bien que le ministère ait fait des efforts, depuis dix ans, pour réduire le recours à ces mesures, «une culture reste profondément ancrée dans les établissements de santé», selon Mme Provencher. «Cela fait partie des pratiques.»

Malgré l'adoption en 1998 d'un article de loi définissant la contention comme une mesure «exceptionnelle», des cas pathétiques continuent de faire les manchettes. Au printemps dernier, un jeune autiste est mort asphyxié, après avoir été enroulé dans une couverture de contention à son école spécialisée de Saint-Jean-sur-Richelieu.

À l'été 2008, un recours collectif de 24 millions de dollars a été déposé contre le Centre hospitalier régional du Suroît de Valleyfield, pour avoir utilisé des mesures d'isolement et de contention à l'endroit de centaines de personnes sans raison valable. Des malades psychiatrisés étaient notamment déshabillés en public, affublés de couches et immobilisés sur des civières.

« L'application tous azimuts de ces mesures, c'est une atteinte grave aux droits de la personne », estime Richard Lavigne, directeur général de la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec (COPHAN). Le ministère de la Santé reconnaît d'ailleurs que la contention et l'isolement ont des effets néfastes : courbatures, asphyxie, infection, anxiété, humiliation, etc.

Les 267 organismes demandent au ministère de développer des méthodes alternatives plus humaines, en se basant sur ce qui se fait ailleurs dans le monde - ou même ici. Le Centre gériatrique Maimonides de Montréal, par exemple, a réussi à diminuer le nombre de personnes âgées mises sous contention de 71% à 5% au début de la décennie. « On a baissé les lits au maximum et on a mis des matelas mousse par terre pour réduire les risques de blessures lors de chutes », explique Mme Provencher. «C'est possible de faire autrement, sauf que ça demande un investissement, du temps et surtout une volonté de la part des établissements.»