L'avocat spécialisé dans les causes médicales Jean-Pierre Ménard réclame 3 475 000 $ de deux hôpitaux, au nom d'un couple qui se retrouve avec une enfant lourdement handicapée à la maison, après qu'il ait pourtant demandé qu'on arrête de lui prodiguer certains soins.

Le bébé a manqué d'oxygène durant 37 minutes à la naissance, en novembre 2007. Il s'est donc retrouvé avec de lourds handicaps et une paralysie cérébrale. Les médecins avaient dit que l'enfant serait sourde, aveugle, n'aurait aucune conscience, ne marcherait pas et serait dans un état neuro-végétatif.

À un certain moment, le personnel médical a même parlé au couple de morgue, de prêtre et de services funèbres.

À la suggestion des médecins traitants, le couple avait décidé de retirer le respirateur artificiel de leur fille, puis de cesser de l'alimenter, en s'assurant toutefois qu'on lui donne de la morphine pour qu'elle ne souffre pas. L'enfant devait mourir naturellement.

Toutefois, le comité d'éthique clinique de l'hôpital s'est réuni et a renversé la décision des parents. Selon le couple, qui a rencontré la presse vendredi pour présenter sa poursuite, la décision du comité d'éthique s'est prise sans le consulter. Il a été informé de la décision après coup.

Marie-Eve Laurendeau et Stéphane Mantha soutiennent aussi que cette décision du comité leur a été présentée comme finale, sans qu'on leur dise qu'ils n'étaient pas obligés de la suivre. Le comité leur aurait dit qu'ils pouvaient cependant poursuivre devant les tribunaux pour faire remodifier la décision.

Après quatre mois d'hospitalisation, l'enfant s'est retrouvée chez ses parents, qui doivent en prendre un soin constant.

La mère a dû quitter son emploi d'enseignante pour s'occuper à plein temps de sa fille, qui a environ 15 rendez-vous médicaux par mois et est nourrie par une machine directement dans l'estomac. L'enfant doit aussi être «succionnée» une dizaine de fois par jour, dans la bouche, les narines et l'estomac, parce que ses sécrétions s'accumulent. Elle ne peut se tenir d'elle-même, ni ramper, ni téter. Son développement à long terme reste incertain.

La poursuite de 3 475 000 $ vise le Centre hospitalier de Lasalle où a eu lieu l'accouchement difficile, l'un de ses médecins et l'Hôpital de Montréal pour enfants, où le bébé avait été transféré.

Me Ménard affirme qu'il veut aussi faire clarifier la loi, afin d'encadrer le rôle de ces comités d'éthique.

«Ici on est en présence d'un comité d'éthique qui s'est carrément substitué à la Cour supérieure, qui a renversé la décision des parents, alors qu'il n'avait pas le pouvoir de le faire, qui n'a pas informé les parents de leurs droits, qui ne les a pas informés qu'ils avaient totalement le droit d'ignorer l'avis du comité d'éthique», a dit l'avocat.

«Le comité d'éthique s'est réuni sans consulter les médecins qui avaient pris les décisions initiales d'interruption de traitement, sans même consulter les parents, alors que le règlement de l'hôpital prévoit spécifiquement que les parents doivent participer à la décision. On les a écartés ici. Pour nous, c'est carrément de l'usurpation de pouvoir, de l'abus de pouvoir, qui a eu des conséquences considérables», a conclu Me Ménard.

L'enfant a aujourd'hui 16 mois.