Les Canadiens ont 30 % moins de risque que les Américains de mourir à cause d'une maladie «médicalement évitable», selon de nouvelles études anglo-américaines. Le traitement des maladies cardiovasculaires explique l'essentiel de ces différences.

«On parle beaucoup de l'excellence des soins aux États-Unis, mais on oublie que la couverture est très inégale», explique Karen Davis, qui dirige le groupe de réflexion sur la santé Commonwealth Fund, et qui a signé une analyse dans la dernière livraison du New England Journal of Medicine. «Des problèmes qui pourraient très bien être traités avec une médecine traditionnelle, pas seulement des soins de pointe, font beaucoup plus de ravages qu'ils ne devraient.»

L'économiste new-yorkaise a repris des chiffres d'une étude britannique du début de l'année, qui montre que le nombre de décès médicalement évitables qui surviennent avant l'âge de 75 ans est de 110 par 100 000 habitants aux États-Unis, mais de seulement 77 par 100 000 habitants au Canada. Si le Canada avait le même taux qu'aux États-Unis, 10 000 personnes de plus mourraient chaque année au pays.

L'étude britannique, réalisée par l'École d'hygiène et de médecine tropicale de Londres, n'a pas analysé en détail les domaines où le Canada réussit mieux que les États-Unis. Mais une comparaison avec la France et la Grande-Bretagne montre que les principales carences de la médecine américaine sont les cardiopathies, les erreurs médicales et la mortalité périnatale.

Parmi les grands avantages du Canada, selon Mme Davis, se trouvent les agences provinciales d'évaluation de l'efficacité des nouveaux médicaments et technologies médicales, comme l'Agence d'évaluation des technologies et des modes d'intervention en santé ou le Conseil du médicament au Québec. «Ce n'est pas un modèle parfait parce qu'il n'est pas centralisé à l'échelle canadienne. Si une province encourage l'utilisation d'un médicament ou d'une technologie, la pression est forte pour que les autres fassent de même. Mais c'est tout de même mieux qu'aux États-Unis, où de telles analyses sont embryonnaires et de toute façon morcelées entre les différents régimes d'assurances.»

Dans les deux autres secteurs où Mme Davis pense que les États-Unis doivent faire des efforts, l'informatisation et l'accès aux médecins de première ligne, le Canada se classe encore moins bien. Plus de 80% des médecins travaillent avec des dossiers médicaux numériques en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, contre 28% aux États-Unis et 23% au Canada. Seulement 22% des patients canadiens et 30% des patients américains voient un médecin de famille le jour même où ils en sentent le besoin, contre la moitié des patients en Nouvelle-Zélande, en Allemagne et aux Pays-Bas.

«Les patients voient leur état empirer, ou alors ils se dirigent vers les urgences, qui deviennent engorgées», dit Mme Davis. L'informatisation des dossiers médicaux générerait des économies annuelles de neuf milliards de dollars aux États-Unis. Les dépenses en soins médicaux par habitant aux États-Unis sont les plus élevées au monde, 1,7 fois plus qu'au Canada et 2,4 fois plus que la moyenne de l'OCDE.