L'entente conclue entre l'hôpital du Sacré-Coeur de Montréal et la clinique privée Rockland MD respecte mal les droits, la sécurité et la confidentialité des patients, affirme le Protecteur du citoyen dans un rapport obtenu par La Presse, hier. Comme des ententes semblables sont appelées à se multiplier au Québec, le Protecteur souhaite qu'elles offrent plus de garanties.

Depuis février, l'hôpital du Sacré-Coeur a envoyé environ 300 patients au Centre de chirurgie et de médecine Rockland MD, situé à Mont-Royal, pour diverses interventions chirurgicales. L'établissement public affirme qu'il est débordé et qu'il doit recourir à une clinique privée pour diminuer les temps d'attente. Les médecins de l'hôpital opèrent leurs patients chez Rockland MD en utilisant ses installations et son personnel infirmier.

«Qu'arrive-t-il si une infirmière du Centre n'administre pas le bon médicament? demande-t-il dans son rapport. Le Centre va-t-il le déclarer à la famille? À l'hôpital? Comment le comité de gestion des risques de l'établissement peut-il en être informé et s'assurer que les mesures adéquates sont prises par le Centre pour ses usagers?»

Les préoccupations du Protecteur

C'est en avril que le Protecteur des citoyens, qui est responsable de l'application de la Loi sur le Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux, a ouvert une enquête sur l'entente entre l'hôpital et la clinique. Plusieurs omissions l'inquiétaient alors et l'inquiètent toujours.

«Le Protecteur du citoyen se préoccupe de l'absence de référence spécifique aux droits des usagers, notamment dans le contexte d'une première entente de ce type, qui ouvre possiblement la voie à d'autres, indique son rapport d'inspection, daté du 27 juin (...) Ces droits sont, notamment, le consentement aux soins, le droit à l'information ou le droit de recevoir des services de santé adéquats sur les plans à la fois scientifique, humain et social, avec continuité, de façon personnalisée et sécuritaire.»

Le Protecteur recommande que l'hôpital et la clinique reconnaissent explicitement que tous les droits des usagers reconnus par la Loi sur la santé s'appliquent intégralement aux soins prodigués en vertu de l'entente de sous-traitance. Selon lui, l'entente devrait aussi préciser que les patients opérés à la clinique puissent s'adresser au commissaire local aux plaintes de l'hôpital.

Le droit à la confidentialité

L'entente respecte mal le droit à la confidentialité, ajoute l'organisme, qui relève de l'Assemblée nationale. Même chose pour la prestation sécuritaire des services. Les médecins de Sacré-Coeur qui font des opérations à la clinique travaillent sous l'autorité du Directeur des services professionnels de l'hôpital, mais ce n'est pas suffisant, affirme le Protecteur.

Lors de la première journée d'exploitation du centre le 6 février, une infirmière a injecté par erreur un calmant dans la veine d'une patiente plutôt que dans un muscle, ce qui a provoqué une chute de tension et nécessité des mesures d'urgence. Questionné par La Presse à ce sujet trois semaine plus tard, le directeur médical de la clinique, le docteur Fernand Tarras, avait simplement déclaré: «Il n'y a pas eu d'incident.»

Selon le Protecteur du citoyen, l'hôpital du Sacré-Coeur devrait pouvoir résilier son contrat avec son sous-traitant dès qu'il a des inquiétudes sérieuses quant à la qualité des services. L'entente avec Rockland MD, conclue de façon expérimentale, se terminait le 15 août, mais a été prolongée, a indiqué hier une porte-parole de Sacré-Coeur, Lyne Arcand. Un appel d'offres a été préparé et l'hôpital examinera bientôt les soumissions pour une nouvelle entente, a-t-elle dit.

«Nous avons préparé un addendum à l'entente, qui a été approuvé par le Protecteur du citoyen, a ajouté Mme Arcand. Cet addendum, qui reprend toutes les recommandations du rapport d'inspection, sera adopté d'ici trois semaines et intégré dans le contrat qui suivra l'appel d'offres.»

«L'hôpital du Sacré-Coeur a convenu qu'il soumettrait une entente modifiée, mais nous ne l'avons pas encore reçue, a répliqué Pierre-Paul Veilleux, vice-protecteur du citoyen, au cours d'un entretien, hier. Nous avons bien vu un projet, qui nous convenait, mais cela ne nous suffit pas. Nous voulons voir le texte officiel.»

Un contrat d'une durée de cinq ans pourrait être bientôt signé entre Sacré-Coeur et le Centre Rockland MD ou une autre clinique privée. Le prix fixé varie entre 1000$ et 1500$ selon le type de chirurgie, montant beaucoup plus élevé que ce qu'il en coûte en établissement public, selon le Parti québécois. Personne n'était disponible au Centre Rockland, hier, pour commenter le rapport de vérification du Protecteur du citoyen.