Pierre Savard, scientifique canadien, a contribué à l'ensemble du processus qui a mené à la découverte du boson de Higgs, en juin dernier. De la conception d'instruments de recherche jusqu'à l'analyse des données, le professeur associé à l'Université de Toronto a participé activement aux travaux. Nommé scientifique de l'année 2012 par Radio-Canada, Pierre Savard est aussi la personnalité de la semaine de LaPresse et Radio-Canada.

Pierre Savard était au Conseil européen pour la recherche nucléaire (CERN), à Genève, lors de la découverte du boson de Higgs. Ayant enregistré des données positives, le chercheur et son équipe ont décidé de produire des graphiques de leurs derniers résultats; un long processus qui peut prendre plus d'une trentaine de minutes. L'apparition d'un «gros pic» sur ces diagrammes a confirmé ce que tous espéraient: ils venaient de prouver l'existence de la célèbre «particule manquante».

Mais aujourd'hui, le chercheur québécois se fait un peu plus nuancé. «Nous sommes presque convaincus que nous avons trouvé le boson de Higgs. Nous devons encore analyser toutes les données de 2011 et 2012. Mais je crois bien que c'est ce que nous avons enregistré», précise-t-il.

Pièce manquante du puzzle, qui peut décrire toute forme de matière dans l'univers, le boson de Higgs entre en collision avec les protons, les photons et les électrons. Après ces impacts, les bosons produisent un champ (de Higgs), qui ralentit la vitesse des particules et qui leur donne une masse.

Pierre Savard s'est toujours intéressé à cette particule prédite par Peter Higgs, dans les années 60. «Je me souviens d'une demande de stage, au baccalauréat, où déjà, j'avais longuement parlé du boson de Higgs et de mon intérêt pour des travaux qui pourraient mener à sa découverte.»

Le chercheur a consacré la majorité des 20 dernières années à la recherche de cette particule. Il a participé à la conception d'instruments de mesure, pendant son doctorat à l'Université de Montréal, au début des années 90, et a été présent jusqu'à la publication de l'article à la fin de l'été dernier.

Le professeur, aussi chercheur au Laboratoire national de physique des particules de Vancouver (TRIUMF), souligne que cette découverte est le fruit d'un travail d'équipe colossal. Quelque 3000 chercheurs, dont 130 Canadiens, participent à ces travaux sur la structure de la matière. «Ces travaux ont demandé tellement d'effort à des milliers de gens. Et ils ont tous joué un rôle important, de ceux qui ont surveillé le cours du cuivre avant l'achat de ce métal que l'on retrouve en grande quantité dans le détecteur, jusqu'aux chercheurs qui ont calibré, jour et nuit, l'appareil.»

Malgré les milliers de scientifiques engagés, Pierre Savard avoue que l'ambiance de travail est excellente. «Je suis toujours surpris de voir à quel point on arrive à bien s'entendre.» Le physicien avoue qu'une certaine forme de compétition existe entre les chercheurs, mais que le climat de travail reste sain.

Bien que les travaux se déroulent principalement sur le détecteur Atlas à Genève, les résultats sont vérifiés un peu partout sur la planète. «L'analyse des données est mondiale. Les chercheurs de l'équipe Atlas proviennent d'une quarantaine de pays différents. Même si ça demande beaucoup de temps, on n'a pas besoin d'être en Suisse pour travailler au CERN. J'ai des vidéoconférences presque tous les matins avec eux», ajoute Pierre Savard.

Radio-Canada l'a aussi nommé, la semaine dernière, le scientifique de l'année 2012. Cette mention est attribuée à une personnalité qui, au cours de l'année écoulée, s'est illustrée par une découverte, une publication ou une réalisation remarquable.

Malgré la découverte du boson de Higgs, le chercheur québécois avoue que l'univers offre encore bien des mystères à élucider. Le scientifique désire poursuivre ses recherches sur la matière sombre. Cette forme de matière, encore hypothétique pour l'instant, formerait une grande partie de la masse présente dans l'univers.