Le cancer de la prostate est une maladie masculine encore taboue. Laurent Proulx, qui a reçu un diagnostic il y a un an, veut que ça change. Et cet athlète accompli a choisi de faire les choses à sa façon.

Le premier Tour du courage, un rassemblement cycliste que Laurent Proulx a imaginé, conçu et organisé, a obtenu un vif succès les 19 et 20 juin derniers. Cent dix cyclistes ont participé aux trois étapes présentées dans les Laurentides et au circuit Gilles-Villeneuve, dans l'île Notre-Dame. Au total, 154 000$ ont été amassés au profit de la fondation PROCURE, qui se consacre à la lutte contre le cancer de la prostate, et de la Société de recherche sur le cancer.

 

Mais ce qui a davantage réjoui Laurent Proulx, ce sont les dizaines de messages et de courriels reçus au fil de l'organisation du Tour et dans les jours qui ont suivi. Des hommes lui ont dit qu'ils allaient passer un test de dépistage.

«C'est tout petit, mais selon moi, le message commence à être entendu, dit Laurent Proulx, 49 ans. Plus le diagnostic est fait tôt, plus grandes sont les chances de survie. C'est de l'ordre de 95% si le diagnostic est fait à temps.»

Pour son travail de sensibilisation et d'information sur le cancer de la prostate, et pour la façon dont il a combattu la maladie à bras-le-corps, La Presse et Radio-Canada nomment Laurent Proulx Personnalité de la semaine.

Un autre défi

Entrepreneur en informatique à succès, Laurent Proulx a décidé de se prendre en mains et de se remettre en forme au tournant de la quarantaine. Comme il ne fait jamais les choses à moitié, il s'est fixé un objectif à l'image de son tempérament. Avant l'âge de 50 ans, il voulait réussir l'Ironman d'Hawaii, la mythique épreuve de 3,8 km à la nage, 180 km à vélo et 42,2 km en course à pied.

Presque 10 ans plus tard, au moment où il se sentait enfin prêt à attaquer l'Ironman de Lake Placid, un tremplin vers Hawaii, un défi autrement plus périlleux s'est présenté. À 48 ans, alors qu'il était au sommet de sa forme et qu'aucun symptôme ne l'avait prévenu, il a appris qu'il souffrait d'un cancer de la prostate. Ce sont les résultats irréguliers de ses tests sanguins annuels qui ont alerté son médecin. Même là, Laurent Proulx n'y croyait pas. Les résultats d'une biopsie l'ont stupéfait.

«Vous savez, la publicité sur le cancer dans laquelle des membres d'une famille sont projetés après avoir appris la nouvelle? C'est exactement ce qu'on a ressenti», dit Laurent Proulx, père de trois enfants âgés de 18 à 22 ans.

Il s'est tourné vers la fondation PROCURE, qui offre de l'information, fait de la sensibilisation et contribue à la recherche avec sa vaste biobanque. Cette biobanque contient des tissus prostatiques, du sang et de l'urine, lesquels, combinés à des données cliniques et sociodémographiques, permettent d'espérer la découverte de meilleurs traitements et la mise au point de moyens de détection plus précis.

Laurent Proulx s'est demandé pourquoi le cancer de la prostate, une maladie qui touche un Québécois sur sept, était si méconnu. «Les hommes, vous n'en parlez pas», lui a simplement répondu Malvina Klag, directrice générale de PROCURE.

«Il y a une question de pudeur», explique Laurent Proulx, qui, lui, a choisi d'en parler. «Autant le cancer du sein touche à la féminité, autant le cancer de la prostate touche à la masculinité. C'est un cancer qui va au fondement de l'image qu'on projette d'un homme.»

«Ça ne prend pas trois heures, faire un test de la prostate, insiste-t-il. C'est un test de sang et un toucher. C'est très peu pour les conséquences qui peuvent être énormes. Les femmes ont des tests annuels et elles les font. Nous, les hommes, ça prend moins d'une minute et on ne veut pas aller les faire.»

Tour du courage

Depuis 2007, PROCURE organise la Marche du courage à l'occasion de la fête des Pères. Homme très actif, Laurent Proulx, qui venait de courir son premier marathon de Boston, ne se reconnaissait pas nécessairement dans cette marche festive de 5 km qui se tient au parc Jean-Drapeau. Il a donc proposé ce Tour du courage, qui s'est greffé à la Marche cette année. Les 111 participants ont convaincu 1500 donateurs. Si une personne sollicitée sur 10 a fait un don, le message a peut-être atteint de 15 000 à 20 000 personnes, calcule Laurent Proulx.

Ce matin, il enfourchera son vélo pour parcourir la distance entre Montréal et Québec. S'il est chanceux, un ami l'accompagnera. Sinon, il le fera seul. Le temps presse. En août prochain, il doit participer à une course cycliste de 238 km dans les montagnes en Autriche. Et il y a cet Ironman en Arizona le 21 novembre qu'il doit préparer. Laurent Proulx aura alors 50 ans. Et cela fera à peine un an qu'il aura subi l'ablation de la prostate.