Homme de hockey d'expérience, l'entraîneur-chef du Canadien a réussi, ce printemps, à mener une équipe complètement remodelée à la finale de l'Association de l'Est, du jamais vu depuis 1993. Le Tricolore en a surpris plusieurs au fil de son aventure en séries. Et suscité un engouement monstre dans la province.

Tous ceux qui ont déjà écouté Jacques Martin en conférence de presse le savent: l'entraîneur du Canadien est un homme peu flamboyant.

En cela, on peut voir quelque chose d'ironique dans le fait qu'il soit aujourd'hui nommé «Personnalité» de la semaine.

Pourtant, l'image publique que dégage l'entraîneur de 57 ans ne correspond pas à la réalité.

Jacques Martin choisit ce qu'il veut dire aux médias. La plupart du temps, il en dit volontairement le moins possible. Mais cela ne signifie pas pour autant qu'il n'a pas d'idées.

Quant au ton monocorde qu'il adopte devant les micros, ses propres joueurs vous diront que Martin est tout à fait capable d'élever la voix!

Cela dit, ce n'est pas tant ce qu'est Jacques Martin qui est remarquable que ce qu'il vient d'accomplir.

Cet entraîneur de carrière, arrivé à Montréal le 1er juin 2009 avec la mission d'apporter expérience et discipline, a mené le Tricolore à trois victoires d'une présence en finale de la Coupe Stanley.

Martin avait déjà guidé les Sénateurs d'Ottawa à une finale d'association, en 2002-2003. Mais à l'époque, les Sénateurs étaient considérés comme des prétendants sérieux à la Coupe Stanley. Que leur parcours en séries ne se soit jamais poursuivi plus loin avait laissé une tache à son dossier.

Or, le Canadien de cette année n'avait rien d'un prétendant sérieux. Pour avoir mené cette équipe bien au-delà des espérances, ce qui corrigera sûrement certaines perceptions à son égard, La Presse et Radio-Canada nomment Jacques Martin Personnalité de la semaine.

Une greffe du coeur

Contre toute attente, le Canadien a vaincu deux puissances de la LNH - les Capitals de Washington et les Penguins de Pittsburgh - avant de s'incliner en cinq matchs face aux Flyers de Philadelphie.

Personne n'aurait cru à un tel scénario au début du mois d'avril, alors que la simple participation du Tricolore aux séries était en péril.

Un seul petit point au classement a évité au CH une fin de saison prématurée.

«On s'est regroupés en tant qu'équipe», raconte l'entraîneur originaire de St. Pascal, en Ontario.

«On a vraiment vu le caractère des joueurs en séries éliminatoires. On a vu leur engagement et leur façon d'appliquer le système, et ça a porté des fruits.»

À défaut d'être charismatique, Jacques Martin s'est révélé bon vendeur. Il a passé l'année à peaufiner son système de jeu et à inculquer des valeurs au groupe hétéroclite que le Canadien avait rassemblé.

Et c'est là un aspect non négligeable du travail de Jacques Martin.

D'ordinaire, les entraîneurs misent sur un noyau en place qui possède sa propre cohésion. Or, le grand ménage fait par Bob Gainey, après la dernière saison, était inégalé dans l'histoire du club centenaire: la moitié des joueurs ont été remplacés.

Un tout nouveau groupe a appris à se connaître et à devenir une équipe. Et c'est Jacques Martin qui a supervisé cette greffe du coeur.

L'opération a nécessité du temps. Mais les résultats ont commencé à se matérialiser dans les deux derniers mois.

«À chaque série, un élément différent est ressorti», a noté Jacques Martin en évoquant le travail du gardien Jaroslav Halak, des unités spéciales et du groupe de vétérans.

«On a maintenant une meilleure appréciation de chacun des individus qui forment notre équipe.»

Un privilège

Le directeur général Pierre Gauthier, avec qui Martin a travaillé à Ottawa, à la fin des années 90, misera dorénavant sur la stabilité. Une stabilité qui commence par son entraîneur et lui.

«On forme une bonne équipe, on travaille bien ensemble, a confié Pierre Gauthier.

«J'ai ressenti un ralliement au sein de notre groupe et il faut donner le mérite aux entraîneurs, qui ont été capables de rejoindre tous ces gars-là. À mesure que les séries avançaient, de plus en plus de joueurs voulaient faire une différence.»

C'était la 15e saison de Martin en tant qu'entraîneur-chef dans la Ligue nationale de hockey. Il a également été adjoint - entre autres avec les Nordiques de Québec - en plus d'occuper le poste de DG avec les Panthers de la Floride.

Mais l'expérience de Montréal lui a fait vivre quelque chose de nouveau. L'engouement pour le Canadien était impossible à ignorer, même pour cet homme calme et tempéré.

«C'est un privilège d'être entraîneur dans un marché comme Montréal, là où les partisans sont aussi émotifs et aussi attachés à leur équipe», raconte Jacques Martin, qui vient de terminer la première saison d'un contrat de quatre ans.

«Et c'est un marché intéressant car il soutire le meilleur des joueurs, des entraîneurs et de l'organisation.»

C'est un privilège d'être entraîneur dans un marché comme Montréal, là où les partisans sont aussi émotifs et aussi attachés à leur équipe.