Originaire de Rosemère, Alexandre Bilodeau a remporté la médaille d'or à l'épreuve masculine des bosses en parallèle au Championnat du monde de ski acrobatique à Inawashiro, au Japon, le 8 mars dernier. Entre ciel et terre, il a imprimé sa performance acrobatique pour les générations à venir.

Il n'a rien vu du ciel. Malgré les cris enthousiastes de la foule, il s'est concentré sur le terrain qu'il connaît le mieux: la pente enneigée, accidentée, bosselée, enivrante. La neige molle et mouillée n'a pas été un obstacle. Il est entré de plain-pied dans le monde des idoles de ce sport, notamment Jean-Luc Brassard. À 22 ans, il a encore devant lui plusieurs années pour éblouir la jeune génération de skieurs. Dans sa ligne de mire: Vancouver 2010.

 

La Presse et Radio-Canada crient bravo à l'athlète québécois, roi des bosses, qui a accédé à la plus haute marche du podium, en le nommant Personnalité de la semaine.

Fierté légitime

Il est content pour lui-même, pour son équipe, pour ses amis, pour sa famille. Mais pas seulement. «Je suis vraiment content pour mon pays, dit-il. Je rêvais de remporter ce championnat, un titre remis en question aux deux ans. Un Globe de cristal aussi pour l'épreuve masculine des bosses. Il me reste mon troisième objectif à titre d'athlète, celui de remporter l'or aux Jeux olympiques.»

Décollage, maîtrise, vitesse sont les clés de voûte de la victoire dans ce sport très spectaculaire qui se pratique sur une piste de 250 m semée de bosses hautes de 1 m et larges de 40 cm, plus, évidemment, deux sauts sur le parcours.

Il se défend bien de minimiser l'intérêt de la ringuette et du curling, mais le ski acrobatique est pour lui le bouillon parfait des sensations fortes. Il se souvient de ses débuts en ski, à 3 ans, de ses apprentissages «à tourner autour des poteaux» en slalom, jusqu'à ce qu'il comprenne, à 7 ans, que c'était beaucoup plus excitant «d'être sur un terrain inégal, de sauter, d'aller vite». Aventureux, le casse-cou prend cependant des risques calculés.

Un saut périlleux arrière avec double vrille, bien que répété soigneusement sur trampoline et rampe d'eau, est un exemple de ce qui émeut les spectateurs. «Mais ma mère n'aime pas vraiment ça. Elle est inquiète et détourne la tête lorsque je saute. Je crois qu'elle ne s'est jamais habituée», dit-il avec de l'affection dans la voix. Et il rappelle que sa soeur de 15 ans fait aussi du ski acrobatique!

Dans l'équipe canadienne de ski acrobatique, les athlètes sont solidaires, la compétition s'exerce envers les skieurs des autres pays. «Les quatre meilleurs au monde sont dans notre équipe, dit-il. C'est sûr qu'on a envie de rester en haut du podium. On tend la main vers les autres membres de notre équipe pour qu'ils nous y accompagnent.»

L'avenir

La carrière des skieurs acrobatiques est relativement courte si on tient compte de l'usure prématurée de certains muscles mis à dure épreuve, aux blessures quasi inévitables. «Le sport acrobatique rajeunit et se développe chez des plus jeunes. Une retraite à 25-26 ans paraît raisonnable. Je pourrais participer aux Jeux de 2014...»

Alexandre Bilodeau se donne à fond dans tout ce qu'il fait. Au cours de sa prochaine carrière encore lointaine, on peut croire qu'il connaîtra autant de succès. «Après 2010, je reprends le cégep. Je veux devenir comptable comme mon père, et j'adore la finance.» Lors d'une précédente entrevue à La Presse, il avait effectivement avoué sa passion des mathématiques, de la physique et de la biologie. «Avec un titre de champion du monde dans mon curriculum, il me semble que les contacts vont être plus faciles à établir, qu'on aura confiance.» Il est inscrit au cégep à distance, en sciences de la nature.

Privilégié, reconnaît-il, sur bien des plans, il est né le 8 septembre 1987 dans une famille qui l'a toujours soutenu et encouragé, avec laquelle il garde des liens étroits, même s'il vient de quitter Rosemère pour devenir propriétaire d'un appartement près du Centre Bell. Entre sa mère, patineuse artistique, et son père, joueur de hockey, l'activité physique a toujours été une valeur importante dans le clan. Le hockey a du reste été l'un des premiers sports qu'Alexandre a pratiqués en compagnie de ses amis, les fils de Gaétan Boucher.

Des nombreux pays qu'ils a visités hors Amérique - Australie, Suisse, Allemagne, France, Japon -, il ne connaît de leurs beautés que les montagnes. Il compte se reprendre un jour et partir à leur découverte. Lorsqu'il n'y a pas de compétition en vue, lorsque l'entraînement ralentit un peu, il préfère se retrouver en famille, entre amis, regarder des téléséries et surtout maintenir le rythme des études.

Pour le moment, son sport occupe la grande part de sa vie. Il y consacre son énergie, même si la jolie Karell, sa petite amie, incarne les projets de leur avenir.