Le Canadien National (CN) demande que des travaux de renforcement de 7,3 millions soient réalisés sur ses infrastructures de voies avant de permettre l'utilisation de nouvelles locomotives bimodes sur les lignes de train de banlieue de Deux-Montagnes et de Mont-Saint-Hilaire, ainsi que pour le futur train de l'Est.

Dans un entretien cette semaine à La Presse, une porte-parole de l'Agence métropolitaine de transport (AMT), Brigitte Léonard, a confirmé qu'une rencontre avec le CN est prévue, d'ici peu, pour discuter du «partage des coûts» et de l'ampleur des travaux qui seront requis afin de répondre aux exigences de sécurité du géant nord-américain des chemins de fer.

Mme Léonard a affirmé que les travaux prévus visent surtout à répondre à une «préoccupation de sécurité» exprimée par le Bureau de la sécurité des transports (BST) à la suite d'un déraillement survenu en décembre 2011, à la Gare centrale de Montréal.

Il y avait 1400 personnes à bord du train de banlieue, lors de l'accident. Personne n'a été blessé.

L'accident a toutefois entraîné la mise au rancart, pendant près d'un an, de 20 locomotives ALP45-DP flambant neuves qui ont coûté plus de 300 millions à l'AMT.

Actuellement, elles sont utilisées uniquement sur la ligne de train de banlieue de Blainville-Saint-Jérôme, qui circule sur des voies appartenant au Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP).

Le CN n'a pas autorisé l'AMT à les remettre en circulation sur son réseau depuis le déraillement de la Gare centrale.

Le temps presse

C'est la première fois que l'AMT reconnaît implicitement le besoin de renforcer l'infrastructure ferroviaire pour permettre la circulation de ses locomotives, qui sont plus lourdes que la majorité des engins en service au pays.

Le temps commence à presser pour l'AMT. L'Agence prévoit en effet mettre en service, l'an prochain, une nouvelle ligne de 51 km entre Montréal et Mascouche. Les coûts du projet, connu sous le nom du train de l'Est, devraient avoisiner les 700 millions d'ici à la fin des travaux, prévue au printemps 2014.

Or, sans une entente avec le CN, propriétaire du principal tronçon ferroviaire emprunté par le train de l'Est, et sans les locomotives bimodes qui peuvent fonctionner à la fois au diesel ou à l'électricité, la mise en service de ce coûteux projet est impossible.

Les demandes du CN sont pourtant connues de l'AMT depuis au moins six mois.

En entrevue à La Presse en septembre dernier, Claude Mongeau, PDG du CN, en avait d'ailleurs fait état en indiquant que, «plus vite on fera les travaux, plus vite les locomotives pourront circuler».

«On a fait les estimations, on les a expliquées en détail à l'AMT, a alors affirmé le grand patron du CN. Les responsables de l'AMT sont venus avec nous sur le terrain pour voir exactement à quels endroits on propose de renforcer les voies. On a dit: c'est 7,3 millions, quand peut-on commencer les travaux?»

Selon le CN, les infrastructures de voies doivent être renforcées dans les courbes les plus prononcées du réseau, en raison du poids plus élevé des locomotives bimodes, et des efforts latéraux qu'elles exercent sur les rails au moment de leur passage.

À l'époque, l'AMT a décliné les demandes du CN dans l'attente des conclusions du Bureau de la sécurité des transports, organisme fédéral indépendant chargé d'enquêter sur l'accident et d'en déterminer les causes précises.

Préoccupation

Dans son rapport rendu public le 24 janvier dernier, le BST a mis en cause l'état des voies du CN à la Gare centrale lors du déraillement du 9 décembre 2011.

Le BST a aussi estimé que les nouvelles locomotives de l'AMT respectent toutes les normes de conception nord-américaines.

Les causes de l'accident ne peuvent toutefois pas être attribuées uniquement à l'état des voies ferrées, qui respectaient aussi les exigences de conception et d'entretien pour une voie de catégorie inférieure, où les convois circulent à basse vitesse (entre 15 et 20 km/h).

Ces facteurs ont incité le BST à exprimer une «préoccupation» de sécurité, en estimant qu'il «se pourrait que les voies ferrées de basse catégorie [comme celles de la Gare centrale de Montréal] ne soient pas toujours assez résistantes pour permettre le passage sécuritaire de ces locomotives plus lourdes».