L'idée de reconstruire le pont Champlain par étapes en recyclant une partie des structures actuelles, préconisée par l'ingénieur René Therrien, ne serait «pas viable» et pourrait même coûter plus cher que la construction d'un nouveau pont, selon une note technique que La Presse a obtenue mercredi.

Dans un document de 11 pages daté du 4 janvier dernier, la firme de génie-conseil Arup estime que le concept proposé par cet ingénieur à la retraite spécialisé en ponts et structures est «risqué» sur le plan technique et qu'il constituerait «une mauvaise stratégie d'investissement» sur le plan financier.

L'ingénieur retraité René Therrien a une solide expertise dans les travaux de réfection de plusieurs ponts majeurs au Canada. Il a siégé plusieurs années au conseil de la Société des ponts Jacques-Cartier et Champlain, qui gère et entretient le pont Champlain.

À la fin de 2011, quelques mois après l'annonce de la construction d'un nouveau pont par le ministre fédéral des Transports, Denis Lebel, l'ingénieur a rendu public un concept de remplacement partiel qui serait moins long et moins coûteux à construire.

Ce scénario permettrait de plus de conserver la structure d'acier principale du pont qui surplombe la Voie maritime du Saint-Laurent et qui est toujours en bon état, contrairement au reste du pont.

Pour ce faire, l'ingénieur a proposé de construire de nouvelles voies de circulation, de part et d'autre du pont actuel. Dans une deuxième étape, la circulation serait dirigée vers ces nouvelles voies, le temps de réaliser les travaux de renforcement de la structure d'acier et des approches de la Rive-Sud. Deux voies de circulation seraient alors rouvertes dans chaque direction sur la portion existante du pont, en plus des trois voies construites de chaque côté du pont actuel.

Ces travaux pourraient être achevés dès 2019. Cette nouvelle configuration resterait en place jusqu'en 2030, le temps de terminer les travaux de reconstruction de la structure centrale et de ses approches, sur la Rive-Sud.

Selon la firme Arup, l'idée de «maximiser la vie résiduelle et la valeur financière» des structures du pont Champlain qui sont toujours en bon état «est un exercice noble qui justifie certainement considération». Le concept de M. Therrien présente toutefois, de son point de vue, «des lacunes majeures».

À titre d'exemple, une partie du concept de M. Therrien repose sur la conservation des piles existantes sous le pont Champlain actuel, et ce, pour une très longue période.

«Malheureusement, estime Arup, les piles existantes sont déficientes sur le plan de la résistance aux charges de tremblement de terre. Afin de répondre aux exigences de capacité de fondation, les travaux de renforcement nécessiteront une réfection excessive des piles, et un montant substantiel de travaux de fondation dans l'eau.»

Selon l'analyse d'Arup, le concept de M. Therrien, connu sous le nom de Solution pont Champlain, «n'offre pas de réelles améliorations de l'échéancier. Il ajoute à la complexité, aux risques et aux répercussions importantes pour les usagers par rapport à n'importe laquelle des options de remplacement complet du pont Champlain».