Il y a 100 ans cette semaine, le Centre de détention de Montréal, mieux connu sous le nom de prison de Bordeaux, ouvrait ses portes dans un parfum de scandale.

Dans cette prison ultramoderne du nord de l'île de Montréal, chaque détenu avait droit à une cellule individuelle avec toilette, lavabo, table de travail et éclairage électrique.

Autour, les habitants du village de Bordeaux étaient outrés: la plupart d'entre eux n'avaient pas encore accès à ces commodités, raconte Chantal Bouchard, une psychologue et agente de probation qui s'intéresse à l'histoire de cette prison mythique au Québec.

Des dépassements de coûts, même en 1912

Pour ne rien arranger, la construction de l'établissement massif en forme d'étoile avait aussi coûté trois fois plus cher que prévu: près de 2,5 millions de dollars, une somme colossale à l'époque. Le «château de Bordeaux» alimentait ainsi des débats rageurs dans la presse et les chaumières.

«Cela vous rappelle quelque chose?», a demandé hier le ministre de la Sécurité publique, Stéphane Bergeron, sourire en coin, quelques instants avant d'inaugurer une plaque commémorative soulignant le centenaire de ce qui demeure la plus grande prison provinciale du Québec.

Un siècle plus tard, il est vrai que les dépassements de coûts dans les chantiers de construction font plus que jamais l'actualité. La prison de Bordeaux, par contre, peut difficilement être encore qualifiée de «château».

Une rare visite organisée hier pour les médias a permis de constater que les étroites cellules sont tout sauf luxueuses. En raison de la surpopulation carcérale au Québec, certaines d'entre elles accueillent maintenant deux, parfois trois détenus.

De célèbres locataires

Au cours de son histoire, la prison de Bordeaux a accueilli des détenus célèbres, comme Jacques Mesrine et Richard Blass. Elle a connu plus de 25 émeutes, une quarantaine d'évasions et 82 pendaisons. Une potence a d'ailleurs été conservée dans une cour.

Parmi les exécutions les plus controversées, celle de Wilbert Coffin, le 10 février 1956. Sa culpabilité avait été remise en question par une partie de l'opinion publique - et l'est toujours.

Dernière exécution

Quelques heures avant d'être pendu, le 11 mars 1960, Ernest Côté avait quant à lui prononcé un vibrant plaidoyer contre la peine capitale, raconte Mme Bouchard. «Il ne savait pas qu'il serait le dernier homme exécuté au Québec.»