Célèbre lieu de rencontre des amoureux, le belvédère Camilien-Houde, sur le mont Royal, est aussi le théâtre de rapprochements plus insolites: celui des humains avec une faune assidue de ratons laveurs.

Nourris abondamment, les animaux finissent par avoir de nombreux problèmes de santé et deviennent un peu trop familiers avec les visiteurs - une proximité risquée pour les deux espèces. Le problème est devenu tellement «criant» depuis deux ans que la Ville de Montréal a tenu une conférence de presse cet après-midi sur les lieux mêmes.

À la grande joie des journalistes, elle a attiré l'un des quelque 140 ratons laveurs du parc, qui est resté caché dans les buissons.

Le mont Royal, a rappelé Alan De Sousa, responsable du développement durable au comité exécutif, est un endroit de «grande densité» pour ces plantigrades. Le fait de les nourrir à la main, comme ce serait devenu l'habitude de quelques dizaines de visiteurs, «change leur comportement et nuit à leur propre bien-être». Les ratons deviennent paradoxalement moins farouches... mais plus agressifs quand on leur refuse de la nourriture.

«On voit de plus en plus de ratons dépendants des humains pour se nourrir, note M. De Sousa. Nous sommes ici pour prémunir les gens contre une activité qui peut sembler inoffensive, mais qui est potentiellement dangereuse.»

Habiles, intelligents et... obèses

Selon Jacques Dancosse, vétérinaire au Biodôme de Montréal, il n'est pas rare de trouver sur le mont Royal des ratons laveurs obèses pesant près de 13 kg, soit le double de la moyenne de leurs congénères.

Aucun cas de rage n'a été détecté chez les ratons laveurs de l'île de Montréal depuis trois ans. Ils sont toutefois porteurs de plusieurs autres maladies, dont certaines sont transmissibles aux humains et aux chiens.

On a également relevé plusieurs cas de visiteurs qui se sont fait mordre, mais les statistiques à ce suhet sont imprécises.

En outre, ces petits mammifères «habiles, très intelligents et rusés» n'ont pas leur pareil pour ouvrir les conteneurs à déchets les plus complexes, souligne Denis Fournier, agent technique faune à la Ville de Montréal.

L'organisme Les Amis de la montagne, qui a mis sur pied en 2004 une patrouille composée de quatre permanents et de quelques bénévoles, a d'ailleurs eu un aperçu fascinant de leur intelligence : «Quand ils voient nos patrouilleurs avec leurs vestes, ils attendent avant de sortir», dit Sylvie Guilbault, directrice générale.

Ces patrouilleurs ont le mandat de sensibiliser les visiteurs aux dangers de nourrir les ratons laveurs et distribuent parfois des semblants de contraventions, des «avis de courtoisie». Leur intervention est bien reçue par 95% des personnes interpellées, dit Mme Guilbault, notant qu'une faible minorité refuse de changer ses habitudes.

«La vraie question, c'est: est-ce utile de les nourrir? La réponse est non, dit M. Fournier. Ça donne l'impression de faire une bonne action, mais ce sont des animaux sauvages: ils trouvent tout ce qu'il leur faut dans leur milieu naturel.»