Le match qui se joue devant les tribunaux entre la Ville de Montréal et les propriétaires du Canadien s'en va en prolongation: les deux parties ont décidé d'interjeter appel d'une décision rendue en juillet sur la valeur foncière du Centre Bell. La porte est maintenant ouverte pour la poursuite de cette longue bataille judiciaire, qui a déjà coûté des millions aux contribuables montréalais.

La Ville et les propriétaires du Tricolore se disputent depuis des années sur la valeur foncière de l'amphithéâtre du centre-ville. L'enjeu est de taille, puisqu'il détermine la somme que les propriétaires du Centre Bell et du Canadien doivent payer en impôt foncier chaque année.

Le litige semblait avoir connu son dénouement le 8 juillet dernier. Dans une décision, le Tribunal administratif du Québec (TAQ) a donné en partie raison aux propriétaires du Canadien en concluant que la Ville avait surévalué l'aréna.

Le Tribunal a exigé que Montréal repaye aux propriétaires une somme de 5,8 millions de dollars pour un impôt foncier payé en trop. À l'avenir, la facture d'impôt foncier du Centre Bell devait passer de 10 à 8,5 millions par année, une réduction annuelle de 1,5 million.

Mais devant le TAQ, les propriétaires du Centre Bell demandaient de payer encore moins d'impôt foncier. Manifestement, la décision du Tribunal n'a contenté personne. La Ville de Montréal et les propriétaires ont tous confirmé hier la reprise des hostilités judiciaires. Les deux partis ont déposé une requête à la Cour du Québec pour pouvoir interjeter appel de la décision du TAQ.

«Je vous confirme qu'on a initié un processus d'appel. La raison pour laquelle on le fait, c'est qu'on est en désaccord avec la décision du Tribunal administratif du Québec», a expliqué le vice-président communications du Club de hockey Canadien, Donald Beauchamp.

M. Beauchamp n'a pas voulu expliquer davantage la position des propriétaires du Canadien. À la Ville de Montréal, on s'est aussi refusé à commenter le dossier. Mais selon des copies des requêtes consultées par La Presse, les parties remettent en cause la valeur que le TAQ a donnée au Centre Bell.

Dans sa décision de juillet dernier, le Tribunal a établi la valeur foncière du Centre Bell à 139 millions pour les années 2004-2006 et à 172 millions pour les années 2007-2010. La Ville de Montréal plaide que le Centre Bell vaut respectivement 193 millions et 230 millions pour ces deux périodes, tandis que ses propriétaires demandent plutôt d'établir sa valeur à 49 millions et 60,5 millions.

Le domicile du Tricolore, inauguré en 1996, a été construit au coût de 240 millions. En juin 2009, le Centre Bell, le Canadien de Montréal et le promoteur de spectacles evenko ont été vendus à un consortium mené par la famille Molson pour 575 millions, mais la valeur de l'édifice dans la transaction n'a jamais été rendue publique.

Des honoraires galopants

La Cour du Québec va entendre les deux parties durant quatre jours d'audience au mois d'octobre. Si le tribunal accorde l'appel, le litige qui dure depuis maintenant quatre ans pourrait s'éterniser. La cause a déjà nécessité 154 jours d'audience devant le TAQ.

La Ville de Montréal a jusqu'à maintenant déboursé près de 2 600 000$ dans ce dossier pour s'adjoindre les services de professionnels externes, soit un avocat et un expert comptable.

Ces sommes ne comprennent pas les salaires des fonctionnaires municipaux qui ont aussi travaillé sur le dossier. Selon une porte-parole de la Ville, Patricia Lowe, un avocat du service du contentieux de la Ville ainsi qu'un évaluateur ont aussi planché sur le litige. «Des efforts importants ont été investis dans la preuve et la représentation de la Ville devant le TAQ», a-t-elle résumé.