Tant le gouvernement Charest que l'opposition péquiste ont blâmé la Ville de Montréal, hier, pour avoir scruté les courriels de son vérificateur général, Jacques Bergeron, soupçonné d'irrégularités.

Le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, estime que la Ville de Montréal est allée trop loin en fouillant pendant 10 mois les courriels du responsable de la vérification, nommé non par l'Administration, mais par le conseil municipal.

«Le vérificateur doit avoir les coudées franches. Il n'est pas au-dessus des lois, mais il est là pour vérifier l'Administration, et non pour être vérifié par l'Administration», a dit le ministre, hier, à l'entrée de la réunion des députés libéraux.

Devant la controverse apparue à l'hôtel de ville de Montréal, le ministre a blâmé sans équivoque l'administration Tremblay pour «sa façon de faire» dans cette enquête. «Le vérificateur doit avoir l'indépendance de ses actions. Il est nommé aux deux tiers du conseil. Le vérificateur est une personne indépendante qui ne relève pas directement du lien hiérarchique du directeur de la Ville», a insisté le ministre responsable de l'application de la Loi des cités et villes.

Marc Lacroix, son sous-ministre, devait hier prendre contact avec l'administration Tremblay pour obtenir sa version des faits.

La Presse a révélé hier que le comité de vérification de la Ville a enquêté pendant 10 mois sur le vérificateur Jacques Bergeron, souvent à couteaux tirés avec l'administration Tremblay. Pendant toute cette période, ses courriels étaient lus par les enquêteurs mandatés par Pierre Reid, devenu contrôleur général de la Ville en juin dernier.

«Le processus doit être encadré si quelqu'un veut porter plainte à l'endroit du vérificateur, qui n'est pas au-dessus de la loi. Cela doit être encadré, et c'est ce que je vais faire», a soutenu M. Lessard.

En l'occurrence, M. Bergeron aurait dû être prévenu des doléances de la Ville. «Il faut l'aviser, on ne peut vérifier quelqu'un pendant 10 mois parce qu'on a des doutes sur un fractionnement de contrat. Il faut établir un cadre par lequel un vérificateur peut faire l'objet d'une enquête.» Les lois actuelles ne sont pas claires, a dit M. Lessard, et il faudra les préciser.

Le critique péquiste en matière d'affaires municipales, Daniel Ratthé, estime au contraire que «la loi est très claire»: le vérificateur en aucun temps ne relève de l'administration municipale qu'il a le mandat de surveiller. Ce qui s'est passé à Montréal est «étonnant et inacceptable», a dit le député de Blainville. «La municipalité n'a pas agi avec diligence dans ce dossier et elle a outrepassé ses droits», tranche-t-il.

«S'il y avait des présomptions sur M. Bergeron quant au fractionnement de contrats, le conseil aurait dû en être informé», dit le député péquiste. Il s'agit d'une décision qui doit être prise par le conseil, et non par un représentant de l'administration. «Dans le doute, ils auraient pu tout au moins appeler au Ministère pour vérifier», a conclu M. Ratthé.