Le dernier match de hockey à l'aréna de Clermont, village de 3000 habitants à côté de La Malbaie, a été disputé le 22 avril dernier.

Quatre jours plus tard, les camions sont arrivés. Les éléments préfabriqués d'un bâtiment ont été laissés dans le stationnement et quelques jours après, le village comptait une nouvelle construction.

« Ç'a été rapide. Juste le temps qu'on démanche la glace, et c'était monté. » - Jean-Pierre Gagnon, maire de Clermont, à propos du centre de détention

Il s'agit, selon la terminologie de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), d'un bâtiment multifonctionnel temporaire. Ici, près de La Malbaie, on parle plutôt d'un centre de détention, ou d'une prison de courte durée. Elle doit servir à accueillir les manifestants arrêtés en marge du Sommet du G7, demain et samedi.

Quand le Groupe de la sécurité intégrée (GIS) l'a appelé pour lui proposer qu'on érige le centre de détention à côté de l'aréna, M. Gagnon a demandé des garanties. L'homme de 64 ans, retraité d'une papetière et maire depuis 2005, pense que l'entente est bonne pour sa municipalité.

« On va dévoiler l'entente après le G7. Après, ils vont tout déconstruire et laisser le lieu dans l'état initial, dit-il. L'argent qu'on reçoit, ce ne serait peut-être pas beaucoup pour Montréal ou Québec, mais pour nous, ce n'est pas rien. »

À la GRC, qui fait partie du GIS, on refuse de dévoiler le coût de la construction pour ne pas nuire à la sécurité, dit-on.

« Par rapport aux coûts de construction, le GIS a complété un processus d'appel d'offres, mais la GRC ne discutera pas des coûts ou des détails des contrats pour préserver l'intégrité des opérations de sécurité pour le Sommet du G7 », a dit hier une porte-parole de la GRC, Geneviève Byrne.

Impossible également pour la GRC de préciser le nombre de personnes que peut accueillir le centre de détention flambant neuf.

Selon nos informations, le mystérieux centre ne doit servir que pour des détentions temporaires. Les personnes arrêtées seront sur place de une à quatre heures.

Le bureau d'aide juridique de La Malbaie a quant à lui reçu des renforts. L'unique avocate qui y travaille en temps normal sera épaulée par trois collègues le temps du Sommet.

« C'est important pour nous de pouvoir répondre à la demande. On ne sait pas s'il y aura des arrestations, mais s'il y en a, on sera prêts. » - Audrey Savard, directrice du bureau d'aide juridique section criminelle à Québec, venue à La Malbaie pour l'occasion

Y AURA-T-IL DES MANIFESTANTS

À deux jours du début du Sommet, La Malbaie était déjà sous haute sécurité hier. Impossible de ne pas voir les dizaines de voitures de police et de ne pas entendre les hélicoptères dans le ciel.

La plage de Saint-Irénée a même été fermée aux promeneurs. Deux immenses aéroglisseurs de la Garde côtière y étaient échoués comme des baleines.

Près du Manoir Richelieu, la police était partout pour bloquer l'accès à l'immense périmètre de sécurité. Les contrôles policiers semblent routiniers. L'auteur de ces lignes a été abordé par une policière alors qu'il attendait sagement dans le stationnement de l'hôtel de ville de La Malbaie, dans son véhicule, en faisant quelques recherches sur son téléphone.

« C'est juste une vérification », a dit la policière après qu'on lui eut montré la carte de presse acquise auprès de la GRC. « On cherche quelqu'un, mais ce n'est pas vous. »

La « zone de libre expression » mise en place pour les manifestants est en fait un stationnement entouré de clôtures - celles qui ont servi à Montréal pour la Formule E - avec 20 toilettes sèches. Il faut franchir un barrage de police pour y accéder.

Dans ce contexte ultrasécurisé, il est légitime de se demander quel manifestant voudra se rendre à La Malbaie plutôt qu'à Québec. La plupart des organismes locaux auxquels La Presse a parlé ne comptent pas y faire de manifestations.

Un groupe de droite, Québec libre en action, a confirmé que c'était là qu'il allait porter son message « antimondialiste » samedi. « La GRC est au courant, ils nous attendent », a dit Jonathan, l'un de ses responsables.

En attendant, hier, la « zone de libre expression » était vide. Un policier à l'entrée a accueilli avec le sourire deux marcheurs qui venaient vers lui. « Allez-y, allez voir. Vous êtes mes deux premiers de la journée ! » Il était 16 h.

« On n'est pas des manifestants », a répondu l'un des marcheurs, avant de tourner les talons et de s'éloigner des policiers, des clôtures de la Formule E et des toilettes sèches.