Les fondeurs qui skient dans les sentiers du mont Saint-Hilaire devront bientôt se trouver d'autres pistes. La Réserve naturelle Gault interdira définitivement l'activité en 2018 pour se rapprocher davantage de sa mission de « conservation », au grand dam des sportifs qui pratiquent le ski de fond au Centre de la nature du mont Saint-Hilaire depuis plus de quarante ans.

« C'est arrivé comme un cheveu sur la soupe, on l'a appris sur un panneau. Il n'y a pas eu de préannonce ni de consultation », déplore Francine Bernard, porte-parole d'un regroupement de skieurs formé après l'annonce de la décision de la Réserve naturelle Gault cet automne. Samedi, ils étaient une trentaine à manifester à l'entrée des pistes du mont Saint-Hilaire.

La Réserve naturelle Gault relève de l'Université McGill, propriétaire du mont Saint-Hilaire depuis 1958. L'organisme, qui protège près de 1000 hectares de milieux naturels, a choisi de retirer le ski de fond de son offre. La politique devait entrer en vigueur cette année, mais un sursis d'une saison a été accordé devant le mécontentement populaire et grâce à une intervention de la Ville.

Seule la moitié des huit kilomètres destinés initialement aux skieurs sera ouverte cet hiver, mais à partir de l'an prochain, la totalité des pistes sera fermée. La Réserve n'a pas l'intention de revenir sur sa décision.

« On n'a rien contre les skieurs, mais on se questionne sur notre identité, sur ce qu'on est et où on s'en va. »

- Virginie Millien, directrice de la Réserve naturelle Gault

SURFRÉQUENTATION

La Réserve naturelle Gault et son Centre de la nature jonglent avec une hausse annuelle de fréquentation d'environ 6 %. Il y a eu quelque 350 000 entrées l'an dernier sur la montagne. L'organisme planche avec les municipalités de Mont-Saint-Hilaire et de Saint-Jean-Baptiste sur l'élaboration de solutions pour notamment mieux encadrer l'achalandage sur le site et assurer sa préservation.

« Tout est sur la table, on parle de circulation, de tarifs à l'entrée... de tout ça, indique Mme Millien. C'est une vision, on veut remettre le cap sur la conservation et les priorités. » Les impacts de la raquette à neige et de l'augmentation de la présence du cerf de Virginie seront entre autres examinés cet hiver. Une réflexion autour du réseau de sentiers sera aussi entamée.

« Si le but est d'en venir à diminuer la fréquentation, c'est un coup d'épée dans l'eau. On est 150 fondeurs qui viennent [de 40 à 50 jours] dans l'année. C'est minime », explique Francine Bernard, perplexe. « Le ski, il s'en fait depuis des années sur la montagne. Mon père venait y skier. Ce n'est pas une décision logique, rationnelle et basée sur une étude. »

« L'optique, ce n'est pas de fermer la porte [aux visiteurs]. Ce serait la pire chose à faire », rassure Mme Millien. Les sentiers utilisés pour le ski de fond seront d'ailleurs rouverts aux randonneurs, ce qui irrite les skieurs qui y voient là une incohérence. « Si on parle de conservation, pourquoi ouvrir ces sentiers aux marcheurs ? », faisaient valoir les manifestants rencontrés samedi.

Mme Millien convient que le ski de fond n'est pas plus « dommageable » que la marche, mais elle réitère que la décision survient dans un contexte où la Réserve souhaite se recentrer sur son identité et sa mission. « Le fait que le ski de fond était offert, c'était un privilège, mais honnêtement, ça n'a rien à voir. On n'est pas un parc de la Sépaq », nuance-t-elle.

MAUVAISE COMMUNICATION

La mission de la Réserve naturelle Gault est entre autres de veiller au maintien de l'intégrité écologique des lieux et de favoriser l'utilisation du site pour de la recherche universitaire. « C'est un laboratoire à ciel ouvert », rappelle Mme Millien. La directrice fait néanmoins son mea culpa pour la façon dont la nouvelle a été communiquée.

« J'en prends la responsabilité. Honnêtement, je ne m'attendais pas à une réaction aussi forte. [...] On va changer notre façon de communiquer, c'est certain », ajoute-t-elle. Entre-temps, les skieurs n'ont pas l'intention de rester les bras croisés et assurent qu'ils maintiendront leurs actions pour que la Réserve revienne sur sa décision.

Une pétition de plus de 1000 noms circule pour s'opposer à l'interdiction du ski de fond au Centre de la nature du mont Saint-Hilaire. La Presse n'a pas été en mesure de joindre le maire de l'endroit, samedi.