Le Comité de déontologie policière vient de blâmer deux agents de Laval pour abus d'autorité, arrestation illégale et utilisation de la force de manière non justifiée à l'endroit d'un jeune homme de 22 ans. La décision conclut que le plaignant aurait plutôt fait les frais d'un doigt d'honneur adressé aux deux policiers.

Les faits reprochés remontent au 5 juin 2008. Vers 17h, Pierre Ricardo Daguste, 22 ans, quitte son domicile en voiture vers le centre commercial Saint-François, situé à 650 mètres de chez lui. Le jeune homme, qui travaille comme opérateur dans une centrale d'alarme, est accompagné d'une amie. Sur le chemin du retour, les agents Jason O'Learly et Steve Parent remarquent sa Nissan Altima ornée d'enjoliveurs.

Les policiers décident de suivre le véhicule. Ils soutiendront lors des audiences devant le Comité que le conducteur a réalisé des virages sans avoir effectué d'arrêts complets ni signalé son intention de tourner.

Après quelques minutes, les policiers arrivent dans la rue où habite le plaignant. À ce moment, ils perdent la voiture de vue. M. Daguste s'est en fait immobilisé chez lui. Les patrouilleurs le voient alors qu'il s'apprête à rentrer dans sa maison. Ils font marche arrière et s'immobilisent devant la résidence. Mais avant d'entrer, M. Daguste leur lance un doigt d'honneur.

Lorsque les policiers s'approchent de la porte d'entrée pour examiner le permis de conduire du jeune homme, ce dernier leur demande de partir parce qu'ils n'ont pas de mandat. Les policiers demandent à M. Daguste de ne pas entrer à l'intérieur, mais lorsqu'il tente d'appeler son père à l'aide de son téléphone cellulaire, l'agent Parent lui signale qu'il est en état d'arrestation pour entrave et le projette de manière rapide et musclée sur le sol pour lui passer les menottes.

L'amie qui accompagnait M. Daguste s'approche de la scène et demande aux policiers de mettre fin à leurs manoeuvres. On lui demande de s'éloigner, ce qu'elle fait immédiatement. Encore sur le sol, le plaignant aperçoit un de ses amis passer en voiture. Il lui crie d'appeler son père.

Les policiers décident alors de le faire monter dans leur véhicule et d'aller poursuivre l'intervention plus loin. À deux reprises, ils s'immobilisent et lui offrent le choix de recevoir une contravention ou d'écoper d'un casier judiciaire et passer trois jours en prison, indique le témoignage de M. Daguste.

Selon le Comité, le fait d'avoir quitté la résidence sans avoir informé le jeune homme des accusations qui pesaient contre lui soulève «de sérieux doutes sur le comportement des policiers».

«Le départ des policiers avec le plaignant vers «un environnement plus calme» constitue à lui seul de l'intimidation», écrit le commissaire Me Pierre Gagné dans sa décision rendue le 2 août dernier. «Le Comité ne voit aucune justification aux déplacements des policiers... si ce n'est de vouloir intimider M. Daguste et lui faire payer cher le «doigt d'honneur» qu'il leur avait fait. En effet, rien sur les lieux de l'événement ne menaçait la sécurité des policiers ou pouvait les empêcher d'effectuer leur travail librement.

«D'ailleurs, poursuit la décision, les policiers font grand état de ce «doigt d'honneur» dans leurs rapports alors qu'ils ne font pas mention des supposées multiples infractions qu'aurait commises M. Daguste.»

La décision du Comité de déontologie a toutefois rejeté le reproche selon lequel les policiers auraient ciblé M. Daguste parce qu'il est noir. Elle ne prévoit aucune sanction à l'égard des agents.

Appelé à réagir à la décision, le porte-parole du Service de protection des citoyens de Laval, Daniel Guérin, a indiqué que c'est au commissaire à la déontologie d'imposer des sanctions aux policiers. Il a affirmé qu'il s'agissait de la première plainte déposée contre les deux agents et donc qu'il n'y aurait pas de conséquences.