Un conseiller municipal de Laval menace de poursuivre deux anciens candidats de l'opposition qui ont réclamé sa démission. David DeCotis et Lydia Aboulian, du Mouvement lavallois, ont reçu une mise en demeure, lundi, quelques jours après avoir déclaré que Jean-Jacques Beldié devait quitter ses fonctions en raison d'une apparence de conflit d'intérêts.

Un huissier s'est présenté au lieu de travail de M. DeCotis pour lui remettre en main propre la mise en demeure. Mme Aboulian, elle, est à l'extérieur du pays, mais un membre de sa famille a accusé réception du document.

 

«Au cours des dernières semaines, vous avez délibérément et sciemment agi de façon à nuire à notre client en tenant publiquement des propos qui laissent sous-entendre, à mots à peine couverts, que celui-ci aurait favorisé des membres de sa famille en s'ingérant dans le processus décisionnel de l'organisme qu'il préside», peut-on lire dans la lettre.

Défait aux élections du 1er novembre, le Mouvement lavallois estime que le conseiller Beldié, membre du Parti PRO des Lavallois de Gilles Vaillancourt et président de la Société de transport de Laval (STL), s'est placé dans une situation d'apparence de conflit d'intérêts.

À deux jours des élections, le site Ruefrontenac.com a révélé que des entreprises appartenant à la belle-famille de M. Beldié avaient obtenu de la Ville des contrats de plusieurs millions, en plus d'être fournisseurs de la STL.

La conjointe de M. Beldié est Margaret Mergl, dont la famille est très active dans le monde de la construction à Laval. Les Mergl possèdent en outre la firme Nepcon, qui a décroché pour 40 millions de contrats entre 2001 et 2008, selon un décompte réalisé par La Presse. Le site Ruefrontenac.com calcule que l'entreprise s'est vu confier des contrats totalisant 12 millions depuis le début de l'année.

En 2000, Nepcon a été l'une des six entreprises à admettre sa culpabilité dans une affaire de collusion pour l'obtention d'un contrat de déneigement du ministère des Transports du Québec.

Le beau-frère de M. Beldié, Anthony, est par ailleurs l'un des propriétaires d'Industries A. Mergl. Cette firme a installé 80 abribus pour le compte de la STL.

M. Beldié ne siège pas au comité exécutif de Laval et n'a donc aucun droit de regard sur l'attribution des contrats, indique-t-on à la Ville. On précise aussi qu'il s'est retiré de toutes les décisions concernant les entreprises de sa belle-famille dans le cadre de ses fonctions à la STL.

Mais pour le Mouvement lavallois, il y a tout de même apparence de conflit d'intérêts. C'est pourquoi le parti a réclamé la démission de M. Beldié, jeudi dernier.

«Il n'est pas suffisant de sortir des réunions lors de l'examen des contrats qui pourraient être attribués à des membres de sa famille, a affirmé M. DeCotis. Il faut simplement ne pas siéger dans les comités qui peuvent attribuer de tels contrats.»

L'avocat de Jean-Jacques Beldié somme l'ancien candidat de lui transmettre sur-le-champ toute preuve qui démontre que son client a enfreint les règles d'éthique, faute de quoi il le poursuivra.

M. Beldié n'a pas donné suite à la demande d'entrevue de La Presse, hier.

M. DeCotis, lui, avait annoncé son intention de questionner le maire Gilles Vaillancourt à ce sujet lors du conseil municipal de lundi soir. Comme il a reçu la mise en demeure quelques heures plus tôt, il ne s'est pas présenté au microphone. Il a préféré ne pas commenter l'affaire, hier.

Le maire de Laval, Gilles Vaillancourt, a toujours défendu son conseiller, dont il qualifie le travail d'«exemplaire». Son attachée de presse, Amélie Cliche, a indiqué hier que M. Beldié paiera de sa poche les frais d'avocat et qu'il ne s'agit pas d'une tentative de museler l'opposition.

«Cette démarche juridique demande à ce que les gens visés qui ont tenu publiquement des sous-entendus démontrent les preuves soutenant la véracité de leurs propos», a-t-elle affirmé dans un courriel.