Nicole Patoine St-Amour est morte du mésothéliome en février 2004, à 61 ans, sans jamais avoir su où elle avait été exposée à l'amiante. Aujourd'hui, son mari Pierre St-Amour approuve le principe d'une réglementation plus serrée concernant cette substance cancérigène.

L'exposition à l'amiante est la seule cause connue du mésothéliome. Mme St-Amour avait travaillé dans des écoles primaires depuis l'âge de 18 ans. Elle a notamment passé plus de 15 ans à l'école Vanguard, à Saint-Laurent, comme professeure d'arts plastiques pour les enfants en difficulté. Si un règlement comme celui qu'on propose aujourd'hui avait existé à l'époque, «il y aurait eu des enquêtes faites là où Nicole a travaillé», estime M. St-Amour.

La famille de Mme St-Amour croit que l'enseignante a été exposée à l'amiante au travail, mais il n'y a jamais eu d'enquête à ce sujet, même si le mésothéliome est une maladie à déclaration obligatoire depuis novembre 2003. «Une personne qui serait aujourd'hui dans sa position devrait exiger des travaux et passer des tests, dit M. St-Amour. Nous, on n'a jamais fait de démarches auprès de la CSST. Le médecin aurait dû nous avertir lors du diagnostic et déclencher une enquête.»

«Un progrès»

Selon le Dr Fernand Turcotte, professeur émérite de médecine préventive à l'Université Laval, le projet de règlement «constitue un progrès sur le chemin des précautions essentielles à adopter pour réduire les risques que peut comporter l'amiante qui se retrouve dans l'environnement bâti de notre société».

Il estime qu'en visant l'amiante sous forme de flocage et de calorifuge, «on s'attaque aux principales sources d'exposition accidentelle auxquelles se trouvent confrontés les travailleurs qui font de l'entretien préventif, des réparations ou encore de la rénovation. C'est un progrès significatif».

Il est cependant «surpris qu'on ne trouve pas l'obligation du marquage des sites contenant de l'amiante». «Faut-il voir là une omission inspirée par le souci de ne pas provoquer d'inquiétude inutile? La signalisation appropriée est une précaution dont l'utilité est pourtant bien établie. J'imagine que des représentations à ce sujet seront probablement faites, pendant la période de consultation.»

Le principal tueur au travail

Chaque année, l'amiante est la cause de 70% des décès qui font l'objet d'une réclamation à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST). De plus en plus, les travailleurs touchés sont du domaine de la construction. Mais le phénomène pourrait être sous-estimé, selon les spécialistes de l'Institut national de santé publique du Québec. Par exemple, dans le cas du mésothéliome, une forme de cancer qui s'attaque à l'enveloppe des poumons, seul un cas sur cinq (21%) donne lieu à une demande à la CSST. Dans d'autres pays, c'est beaucoup plus élevé. L'exposition à l'amiante est la seule cause connue du mésothéliome.

Quelques chiffres

50 000 tonnes : Quantité d'amiante utilisée chaque année au Canada dans les années 70

559 : Morts causées par des maladies reliées à l'amiante au travail au Québec entre 2005 et 2010

548 : Morts causées par tous les accidents de travail entre 2005 et 2010

(source : CSST)

Lexique

Flocage d'amiante : Jusqu'en 1990, on giclait l'amiante sur les parois internes ou les structures des bâtiments afin de les protéger contre les incendies. Cette technique permettait entre autres de prolonger la résistance à la chaleur des charpentes d'acier utilisées dans les gratte-ciel.

Calorifuge : Les conduites d'eau chaude ou de vapeur étaient isolées à l'amiante et ce matériau est encore très présent dans les chaufferies de bâtiments commerciaux ou institutionnels et dans les installations industrielles comme les raffineries. On trouve aussi de grandes quantités de calorifuge à l'amiante à bord des navires.