Inquiète d'une pénurie grandissante de physiothérapeutes dans les hôpitaux, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) sonne l'alarme et réclame l'aide du nouveau gouvernement péquiste. « La saignée doit cesser. C'est la population qui en paie le prix », clame le regroupement, qui souhaite rencontrer le futur ministre de la Santé dès sa nomination.

Ce n'est pas nouveau, le réseau public de la santé manque de physiothérapeutes. Mais la situation a atteint des niveaux inquiétants, croient les professionnels. La moitié des diplômés choisissent d'aller travailler au privé à leur sortie de l'école; choix que seuls 20% des jeunes physiothérapeutes faisaient il y a 20 ans. «Ils sont effrayés par la charge de travail », remarque Pierre Allard, professeur à l'Université de Sherbrooke et physiothérapeute à l'Hôpital général juif de Montréal.

Les attraits du privé sont nombreux. Salaires plus élevés, horaires flexibles, cas plus légers et charge de travail moindre, entre autres. « Alors que s'ils viennent au public, on est souvent obligé de les lancer dans un poste en leur disant «arrangez-vous», tellement on est occupés », raconte M. Allard. L'autre grand concurrent de la physiothérapie en centre hospitalier est l'ergothérapie, une profession semblable, mais mieux rémunérée à cause d'un rajustement d'équité salariale de 5,9% survenu en 2010. Les physiothérapeutes n'avaient eu droit qu'à 0,9%. Ils veulent que ça change.

Une meilleure rémunération

« Si on veut attirer les physiothérapeutes vers le réseau public, il est urgent d'en améliorer les conditions de travail, notamment par une rémunération à la hauteur de leur formation (de maîtrise) », estime la présidente de l 'APTS, Carolle Dubé.

Selon Pierre Allard, le manque de personnel est rendu si criant dans les établissements publics que ses collègues n'ont pas le temps de voir tous leurs patients. « Il y a des patients qu'on devrait voir cinq fois par semaine, mais on a juste du temps pour trois. » Il fait aussi état de la difficulté de remplacer les personnes en congé de maternité dans cette profession majoritairement féminine.

Lui aussi croit que la solution réside dans une meilleure rémunération. Mais en attendant un ajustement salarial, c'est par l'attrait du défi qu'il convainc ses étudiants de se diriger vers le secteur public. « C'est drôle à dire, mais je leur vante la difficulté du travail. Je leur dis qu'ils auront la chance de toucher à toutes sortes de cas dans plusieurs services. Ils apprendront énormément de choses et seront très stimulés. »