Entre optimisme et réalisme, la 19e Conférence sur le sida s'est ouverte dimanche à Washington autour d'une idée qui n'a plus rien d'utopique: en finir avec le sida.

Stopper l'épidémie de sida? C'est possible, veut croire la 19e Conférence internationale sur le sida, qui réunit 25 000 chercheurs, scientifiques, militants et personnalités politiques jusqu'à vendredi, à Washington.

Après avoir fait 30 millions de morts, le sida tue moins. Un rapport publié par l'ONUsida à quelques jours de l'ouverture de la conférence, dimanche, démontre que le nombre de nouvelles personnes infectées par le VIH est en baisse et que les traitements antirétroviraux sont de plus en plus accessibles. De 10 000$US en 2000, le prix du traitement est maintenant passé à moins de 100$US.

Aujourd'hui, plus de 34 millions de personnes vivent avec le VIH: c'est un record depuis le début de l'épidémie, il y a 30 ans.

«Nous sommes à un moment historique. Nous avons tous les moyens techniques et scientifiques pour stopper l'épidémie», explique le Dr Réjean Thomas, qui, comme chaque année, assiste à la conférence internationale.

«Comme on le sait depuis la conférence de Vienne [en 2010], le traitement réduit l'infection de façon significative. Si tout le monde était dépisté, traité, suivi médicalement, alors le sida mourrait de lui-même. Il n'y aurait plus d'enfants qui naîtraient avec le VIH, il n'y aurait plus de transmission sexuelle», dit-il.

Pas de lunettes roses

Toutefois, il ne faut pas voir l'avenir avec des «lunettes roses», prévient le fondateur de la clinique L'Actuel.

C'est en Afrique subsaharienne que vivent et 91% des enfants de moins de 15 ans touchés par le VIH et 75% des jeunes de 15 à 24 ans. L'aide internationale reste encore indispensable pour enrayer l'épidémie.

Mais le financement alloué par la communauté internationale pour la lutte contre le sida est resté stable depuis 2008. L'ONUsida estime que, pour riposter au VIH d'ici à 2015, il faut investir entre 22 et 24 milliards de dollars américains. Le manque d'investissement s'élève à 7 milliards.

«Il faut une volonté politique, un investissement, et c'est là où il y a une plus grande inquiétude», dit le Dr Thomas.

En plus de fournir l'accès à la trithérapie, il faut aussi former des spécialistes du sida et améliorer l'accès au dépistage, mais aussi aux traitements: autant d'enjeux qui peuvent être critiques dans les pays en développement, mais aussi dans les pays développés.

Ainsi, au Canada, rappelle le Dr Thomas, 25% des personnes contaminées par le VIH ignorent leur état. Les besoins en dépistage et en prévention sont toujours grands.

Ouvert la semaine dernière à Montréal, le centre de dépistage L'Actuel sur rue est déjà sollicité par de nombreuses personnes.

«Ça montre qu'il y a un besoin», dit le Dr Thomas.

Vers une guérison d'ici à 2018?

Le Dr Mark Wainberg, l'un des pionniers de la recherche sur le VIH au Canada, estime quant à lui que la fin de l'épidémie passera nécessairement par la guérison des infections causées par le VIH. C'est aussi l'une des préoccupations de la conférence.

«La trithérapie n'est pas une solution permanente, c'est un moyen de tenir le virus en échec. Pour une solution permanente, les cellules responsables du retour viral doivent être tuées. Beaucoup de personnes pensent que si nous pouvons trouver le moyen de copier ces cellules, nous pourrons les tuer», explique ce professeur de l'Université McGill et directeur de recherche sur le sida à l'Institut Lady Davis de McGill à l'Hôpital général juif.

Avec les limites du financement alloué par la communauté internationale à la lutte contre le sida, la guérison n'est donc encore qu'un espoir pour des millions de personnes qui n'ont toujours pas accès aux plus récents traitements antirétroviraux.

M. Wainberg, qui assure la direction scientifique du volet virologique de Spot, service de dépistage du VIH de Montréal, espère que le sida pourra être éradiqué dans cinq ou six ans.

«C'est un rêve, admet-il. Mais nous devons rêver pour avancer, n'est-ce pas?»

En chiffres:

+20% 

En 2011, plus de 8 millions de personnes ont accès à un traitement antirétroviral, une hausse de 20% depuis 2010.

-20%

En 2011, 2,5 millions de personnes ont été nouvellement infectées par le VIH, une baisse de 20% depuis 2001.

-24%

330 000 enfants ont été infectés en 2011 par le VIH, soit 24% de moins depuis 2009.

91%

91% des enfants qui vivent avec le VIH sont en Afrique subsaharienne.

34,2

En millions, c'est le nombre de personnes qui vivent avec le VIH en 2011 grâce au traitement antirétroviral - un record.

-24%

Le sida a tué 1,7 million de personnes en 2011, soit 24% de moins depuis 2006.

2400

Chaque jour, 2400 jeunes sont contaminés par le SIDA.