Les meurtres de deux patients âgés et l'agression d'une patiente de 71 ans survenus à la mi-juin au service de psychiatrie de l'hôpital Notre-Dame ne sont pas dus à un manque de vigilance ou à une pénurie de personnel, ont assuré jeudi des responsables du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM).

Les tragiques événements se sont produits à trois moments distincts. Les meurtres ont eu lieu les 16 et 21 juin tandis que l'agression remonte au 22 juin.

Le directeur général associé du CHUM, Yvan Gendron, a nié que la direction ait tenté d'étouffer l'affaire, qui a seulement fait surface dans les médias mercredi soir. Il a signalé que les décès des patients avaient semblé à priori reliés à des causes naturelles.

En entrevue téléphonique à La Presse Canadienne, le président du Syndicat des professionnels en soins du CHUM, Guy Brochu, s'est demandé s'il pourrait y avoir un lien entre les récentes restrictions budgétaires - qui se sont traduites par des compressions sur le plan des ressources humaines - et les tragiques événements des derniers jours.

«On se questionne (à savoir) s'il aurait dû y avoir plus de surveillance pour éviter que ces événements-là n'arrivent», a signalé M. Brochu.

«C'est sûr qu'il y a un correctif à apporter pour le CHUM, a-t-il tranché. On ne peut pas tout simplement dire que tout a été fait dans les règles de l'art et tolérer que ça continue comme ça. Il y a eu un événement hyper fâchant qui a été commis, qui ne devrait pas arriver dans les hôpitaux. Il faut faire quelque chose.»

Le chef du département de psychiatrie du CHUM, le Dr Paul Lespérance, estime pour sa part que le personnel était présent en nombre suffisant sur le plancher pour assurer un encadrement adéquat. Le Dr Lespérance, qui a parlé d'événements n'ayant «aucun équivalent dans les annales (...) canadiennes» pour qualifier ces crimes, a soutenu qu'il n'y avait pas eu bris de sécurité.

«Ça va être bien sûr évalué, mais par rapport aux normes dans le domaine, aux normes que nous on se donne et dans le cas précis ici, les normes de sécurité étaient entièrement respectées», a-t-il affirmé.

Un suspect arrêté

Un suspect a été épinglé quelques heures après l'agression de la patiente âgée de 71 ans. Idelson Guerrier, âgé de 31 ans, a été interrogé par les enquêteurs le 22 juin et a comparu au palais de justice de Montréal le lendemain.

Il a été accusé d'avoir porté, utilisé ou menacé d'utiliser une arme ou une imitation d'arme et de s'être introduit dans un lieu par effraction en faisant usage de violence.

Le résidant de Joliette s'est présenté de nouveau en cour le 26 juin, date à laquelle une évaluation de sa santé mentale a été ordonnée. Sa prochaine comparution est prévue pour le 30 juillet; en attendant, il demeure sous les verrous.

Les policiers n'ont pas encore établi de lien clair entre les deux meurtres et l'agression survenus à l'hôpital Notre-Dame.

«Tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est une hypothèse possible», a affirmé la relationniste du SPVM, Anie Lemieux.

Les incidents font actuellement l'objet d'une enquête de l'unité des crimes majeurs du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). L'autopsie a déjà permis de déterminer que les victimes, deux patients âgés de 69 et 77 ans, sont mortes par suffocation.

À l'hôpital Notre-Dame, la sécurité semblait sur les dents, jeudi. Les membres du personnel rencontrés au 8e étage du pavillon Mailloux Sud, où sont dispensés les soins en psychiatrie, avaient reçu la consigne de ne strictement rien dévoiler sur cette histoire. Le représentant de La Presse Canadienne a été escorté à l'extérieur du terrain de l'hôpital par un agent de sécurité.

L'affaire faisait jaser autour des tables de pique-nique et sur les bancs de parc installés sous les arbres de l'établissement de la rue Sherbrooke. Tous les patients et membres du personnel interrogés ont appris la nouvelle en feuilletant un journal ou en allumant un téléviseur.

«C'est moi qui l'ai appris aux infirmières en regardant les nouvelles hier (mercredi) soir. Elles sont entrées dans ma chambre, et disons qu'il y avait une petite commotion», a témoigné un patient.

Discrétion critiquée

L'extrême discrétion dont avait fait preuve la direction jusqu'à jeudi après-midi a amené le président du Conseil pour la protection des malades, Paul Brunet, à plaider pour l'ouverture d'une enquête par l'Agence de santé de Montréal.

M. Brunet juge «troublant» que ces deux décès aient d'abord été présentés comme des morts naturelles. Les autorités hospitalières devront expliquer cet écart «qui donne froid dans le dos», a-t-il poursuivi.

Les administrateurs hospitaliers doivent rendre des comptes et ventiler ce genre d'informations, a soutenu M. Brunet, ajoutant que ce type de renseignements ne leur appartient pas.

Il est légitime de s'attendre, en tant que patient, à être hébergé en toute sécurité dans un hôpital, a-t-il poursuivi, s'interrogeant du même coup sur la présence d'un individu «aussi violent» à l'hôpital.

M. Brunet a déploré que le présumé criminel, les patients et le personnel n'aient pas pu être mieux protégés.