D'un côté, la boîte bleue de cigarettes électroniques Zen vante leur «bon goût riche, sans les effets nocifs du tabac». De l'autre, le distributeur québécois, Vincent Deblois, voudrait que son produit soit considéré comme un inhalateur de nicotine semblable à ceux utilisés pour arrêter de fumer.

InLife, société américaine qui commercialise la marque Prestige, affirme que ses cigarettes électroniques sont «une solution de rechange santé au tabac». «Reprenez les droits et privilèges qui vous ont été enlevés», invite la publicité de l'entreprise, en affirmant qu'il est tout à fait légal de fumer la cigarette électronique en public. Parallèlement, sur le web, des dizaines de sites vendent la Prestige avec le slogan «Quit Smoking Now».

C'est ce double discours qui dérange la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. L'organisme voit généralement d'un bon oeil l'arrivée d'une nouvelle béquille pour arrêter de fumer. «Mais à l'heure actuelle, certains vendeurs de cigarettes électroniques semblent surtout motivés par l'idée de créer un nouveau marché», déplore Flory Doucas.

À titre d'exemple, plusieurs fabricants de cigarettes électroniques ont diffusé en 2007 des publicités affirmant que leur produit est reconnu par l'Organisation mondiale de la santé comme produit thérapeutique antitabac. Or, il n'en est rien. L'organisme onusien a même dû publier un communiqué ordonnant aux fabricants de retirer leurs publicités et les invitant à produire des études cliniques et des analyses de toxicité.

Jusqu'à maintenant, aucun fabricant ou distributeur de cigarettes électroniques n'a fourni une telle étude à Santé Canada pour que son produit soit homologué. «C'est étonnant que les entreprises ne veuillent pas faire d'études. Il y aurait beaucoup d'argent à faire en obtenant une homologation», estime Flory Doucas.

Mais selon Vincent Deblois, de Zen eCigarette, une telle étude pourrait coûter jusqu'à 300 000$ à réaliser. «Ce sont des études qui s'étalent sur deux ou trois ans. Ça coûterait une fortune à faire, alors qu'il y a des dizaines d'études qui ont été publiées partout dans le monde et qui démontrent que la cigarette électronique n'est pas dangereuse pour la santé», plaide-t-il.

Parmi ces études, ont trouve notamment celle du Dr Brad Rodu, de l'Université du Kentucky, qui a écrit dans le Harm Reduction Journal, en juillet 2011, que les produits toxiques que contiennent les cigarettes électroniques sont «un million de fois moins importants en concentration que le niveau jugé dangereux pour la santé humaine». Parmi les donateurs qui appuient la chaire de recherche du Dr Rodu se trouve la US Smokeless Company, société apparentée au géant du tabac Philipp Morris, qui produit entre autres les marques de tabac à chiquer Skoal et Husky.

«Je ne me gêne pas! Où que je sois, quand j'ai envie de fumer, je fume. Ça en rend plusieurs jaloux», admet Raphy Cohen, qui s'est converti aux cigarettes électroniques il y a quatre mois. La fumée qui se dégage de son dispositif n'a aucune odeur, puisqu'il s'agit de vapeur. «Ça m'arrive de fumer dans les centres commerciaux ou à l'aéroport. Une fois, j'ai même fumé dans l'avion, mais j'ai vu qu'on me regardait bizarrement, alors j'ai décidé d'arrêter.» Sage décision, car même si les fumeurs d'e-cigarettes comme Raphy Cohen restent rares au pays, tous les grands transporteurs aériens canadiens ont ajouté à leur règlement une précision au sujet de la consommation de cigarettes électroniques à bord. «Les cigarettes électroniques sont permises mais doivent être inutilisées et demeurées [sic] rangées dans le bagage de cabine», lit-on dans le règlement sur les bagages à main d'Air Transat. Le règlement semble être le même chez Air Canada, mais la mention ne se trouve que dans la version anglophone du document.