Des écoles de la province seront inspectées dès l'an prochain pour mesurer la concentration de radon à laquelle sont exposés les élèves et le personnel. L'objectif est de prévenir le cancer du poumon.

Selon ce que La Presse a appris, le gouvernement du Québec est à établir un plan d'action qui devrait être mis en place d'ici à 2010 et visera éventuellement des garderies, des bureaux et même des hôpitaux.

Des programmes sont en préparation, explique le Dr Jean-Claude Dessau, président du Comité québécois sur le radon au ministère de la Santé et des Services sociaux. «À terme, nous aimerions qu'il y ait des mesures dans tous les édifices publics.»

Les responsables de la santé publique souhaitent aussi réaliser la cartographie du radon au Québec, pour mieux cibler les zones à risque.

De son côté, le gouvernement fédéral a déjà une longueur d'avance. Santé Canada a entrepris de mesurer la concentration de radon dans les édifices fédéraux du pays, notamment des bureaux de poste, des postes frontaliers et des bureaux occupés plus de quatre heures par jour.

Depuis l'été dernier, 140 édifices ont été visités au Québec. D'ici trois ans, entre 3000 et 4000 édifices fédéraux seront inspectés dans la province.

Le radon est un gaz radioactif provenant de la détérioration naturelle de l'uranium dans le sol. Il s'infiltre à l'intérieur des immeubles par des fissures dans les fondations.

Une exposition prolongée peut causer le cancer du poumon. Le radon est d'ailleurs responsable de 10% des quelque 6300 décès liés au cancer du poumon survenus l'an dernier au Québec.

Le Dr Dessau se veut toutefois rassurant: «Nous ne voulons pas faire paniquer les gens, mais il faut en parler. Il faut aussi dire que, pour tout problème, il y a une solution.»





Le Québec en retard?

Au Canada, la concentration acceptable de radon a longtemps été fixée à 800 becquerels par mètre cube (Bq/m³). Elle a été abaissée à 200 en juin 2007. Lorsque la concentration de radon dépasse la norme prescrite, des travaux de correction doivent être entrepris.

C'est ce qui s'est passé à l'école des Sommets, à Saint-Sébastien, dans la région du Granit. Avec quatre autres écoles, cet établissement scolaire a participé à un premier projet-pilote en 2007 pour mesurer les concentrations de radon dans les édifices publics.

«Il existait des programmes de dépistage au Québec, mais ils avaient toujours été faits dans les résidences privées, jamais dans les établissements publics. C'est pourtant une pratique qui existe ailleurs, notamment dans des écoles de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan», indique le Dr Fabien Gagnon, médecin-conseil à la direction de la santé publique de l'Estrie, qui a dirigé le projet-pilote dans la région du Granit.

Un rapport de l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) a pourtant évalué dès 2004 l'efficacité d'un programme de dépistage dans les édifices publics.

Cette avenue semblait beaucoup plus efficace pour prévenir le cancer du poumon que la promotion du dépistage volontaire, sur une base individuelle, dans les maisons.

Pourquoi avoir attendu si longtemps? Le risque au Québec est plus faible qu'ailleurs, explique le Dr Gagnon. «Ça peut sembler plus long que dans d'autres provinces, mais ailleurs, le contexte était différent: la concentration au départ était plus élevée.»

En février 2007, les premières mesures prises à l'école des Sommets, à Saint-Sébastien, ont révélé une concentration de 488 Bq/m³. Des mesures prises pendant un an ont ensuite donné des résultats de 289 Bq/m³, soit plus que la norme canadienne.

Aucune des quatre autres écoles du projet-pilote n'avait de concentration supérieure aux normes.

La direction de l'école des Sommets a rapidement informé les parents et les professeurs de la situation. Des capteurs ont été installés sous la dalle de béton de l'école et des ventilateurs évacuent le radon à l'extérieur. Les travaux viennent d'être achevés.

La présence de radon à l'école a d'abord semé l'inquiétude, reconnaît le directeur de l'école, Marcel Boulanger. Mais il faut se rappeler que le gaz est dangereux lorsqu'on y est exposé longtemps, souligne-t-il.

«Quand on apprend la nouvelle, c'est certain qu'on ne saute pas de joie. Mais tout le monde comprend qu'il n'est pas question de quitter l'école ou quoi que ce soit. C'est quand même une situation qui existe depuis longtemps, qui existe ailleurs. Dans notre cas, la seule différence, c'est que nous le savons et que nous avons agi pour la corriger.»

Le radon est un gaz radioactif qui provient de la désintégration de l'uranium dans le sol. Il s'infiltre à l'intérieur des édifices et des maisons par des fissures dans les fondations.

Le tabagisme augmente le risque. Près de 90% des gens qui meurent d'un cancer du poumon à cause du radon sont des fumeurs ou d'anciens fumeurs. Par contre, 10% des décès surviennent chez des personnes qui n'ont jamais fumé.

La meilleure prévention reste de ne pas toucher à la cigarette, rappelle Louis M. Brisson, directeur général de l'Association pulmonaire du Québec. «Pourtant, on panique bien plus avec le radon qu'avec le tabagisme ou la fumée secondaire.»

Un appareil peu coûteux permet d'évaluer la concentration de radon dans une pièce en becquerels par mètre cube d'air (Bq/m³). Un becquerel correspond à la désintégration d'un noyau atomique par seconde, indique le ministère de la Santé et des Services sociaux sur son site internet.

La limite acceptable varie selon les pays. Aux États-Unis, le radon est documenté depuis longtemps et fait même l'objet d'une campagne de sensibilisation à la télé. La norme acceptable y est de 150 Bq/m³. En Europe, la norme varie de 200 à 400 Bq/m³. Au Canada, elle est de 200 Bq/m³ depuis juin 2007.

«Les normes varient d'un pays à l'autre, explique le Dr Jean-Claude Dessau, président du Comité québécois sur le radon. En Suisse, la norme est de 1000 Bq/m³. Cela peut sembler élevé, mais les propriétaires ont l'obligation de faire des travaux correctifs. Ce n'est pas le cas ici. Il ne s'agit que d'une ligne directrice.»

Pour en savoir plus

Santé Canada: hc-sc.gc.ca/ewh-semt/radiation/radon/index-fra.php

Association pulmonaire du Québec: pq.poumon.ca/environment-environnement/radon