C'est une version inédite de la fable du Petit Prince que le ministre péquiste Jean-François Lisée a racontée ce matin. Si Pauline Marois ne rencontre pas Justin Trudeau aujourd'hui à l'Assemblée nationale, c'est à cause de son horaire chargé, mais aussi à cause de ses demandes princières, a accusé M. Lisée.

«M. Trudeau avait demandé à rencontrer les trois chefs en même temps. C'était sa première demande, tel un jeune prince descendant d'Ottawa pour rencontrer ceux qui pourraient être ses sujets. Il voulait que les trois chefs de parti au Québec organisent leur horaire pour le rencontrer, lui, en même temps. Ça nous donne une idée de la distance qu'il y a entre la réalité de la nation québécoise, ses institutions et ses partis politiques, et la compréhension - ou l'incompréhension - que le nouveau chef libéral fédéral a de la démocratie québécoise», a dénoncé M. Lisée.

Il justifiait cette déclaration en disant être «allé aux infos» pour répondre à une question d'un journaliste.

Les cabinets de M. Trudeau ainsi que ceux des chefs du Parti libéral du Québec (PLQ) et de la Coalition avenir Québec (CAQ), démentent cette version. Mme Marois n'a pas voulu la confirmer non plus. Elle a simplement rappelé ce matin que son horaire chargé de première ministre ne lui permettait pas de rencontrer le chef du Parti libéral du Canada, mais qu'elle le fera plus tard.

Le ministre des Affaires intergouvernementales, Alexandre Cloutier, a indiqué que cette version lui avait été rapportée par une seule personne, M. Lisée.

Au bureau de Mme Marois, on explique qu'il s'agit d'une «erreur de communication». Le PLC a appelé au cabinet de la première ministre pour dire qu'il souhaitait rencontrer aujourd'hui les trois chefs - Mme Marois, Philippe Couillard et François Legault. Une personne a indiqué par erreur à M. Lisée que Justin Trudeau voulait parler aux trois chefs en même temps, rapporte-t-on au cabinet de Mme Marois. C'est en raison de cette information inexacte que le ministre a fait sa déclaration aux médias.

Le nouveau chef libéral fédéral a transmis sa demande moins de 48 heures à l'avance, rapporte le ministre Cloutier. «Elle est la première ministre du Québec, il est le chef du deuxième groupe de l'opposition à Ottawa, il doit comprendre que son agenda est chargé.»

«Mépris des Québécois», dénonce Cloutier

Le ministre Cloutier se dit «très ouvert» par rapport aux moyens à prendre pour répondre à la motion unanime adoptée par l'Assemblée nationale pour demander de faire «toute la lumière» sur les tractations entre la Coursuprême, Ottawa et Londres dans le cadre du rapatriement de la constitution.

L'important, a expliqué M. Cloutier, c'est qu'une enquête «indépendante» soit faite, et qu'un échéancier soit fourni pour éviter qu'on essaie de pelleter le problème en avant.

La demande fait suite aux révélations de La Bataille de Londres, un essai qui s'appuie sur des documents d'archives pour démontrer que le juge en chef de la Cour suprême en 1981, Bora Laskin,avait violé le principe de la séparation des pouvoirs en informant Ottawa et Westminster de certains éléments des délibérations du renvoi sur le rapatriement de la constitution.

Contrairement à Londres, Ottawa a caviardé les archives remises à l'auteur, l'historien Frédéric Bastien.

M. Cloutier dénonce le «manque de jugement» de Justin Trudeau, qui célébrait hier la constitution canadienne adoptée par son père, contre la volonté du Québec. En se réjouissant des «bassesses» et des «violations des principes démocratiques» de son père, il démontre son «mépris envers les Québécois», juge-t-il.

M. Trudeau, député de Papineau, a été élu au Québec, rappelle-t-il. «On s'attend à ce qu'il défende les résolutions adoptées par le Québec». Le ministre rappelle qu'aucun premier ministre québécois, souverainiste ou fédéraliste, n'a voulu signer la constitution.

Photothèque Le Soleil

Jean-François Lisée, le ministre québécois des Relations internationales.