À l'écart des caméras de télévision, le ministre de l'Environnement, Yves-François Blanchet, a expliqué, jeudi, comment il a pris ses distances de la controverse qui a contribué à la démission de son prédécesseur Daniel Breton.

M. Blanchet était le premier témoin entendu dans le cadre d'une commission parlementaire obtenue grâce à l'alliance des oppositions libérale et caquiste contre le gouvernement péquiste minoritaire.

Ce mandat confié à la commission a été élaboré pour faire la lumière sur une visite de M. Breton au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), une situation qui a été perçue comme une ingérence politique par ses adversaires.

Pour l'instant, le témoignage de M. Breton n'est pas prévu, et les membres ont entendu son successeur, M. Blanchet, dire qu'il n'avait pas eu de discussions formelles à ce sujet avec personne, ni même avec le principal intéressé.

Tout au plus le ministre a-t-il reconnu qu'il avait pu avoir des échanges, «fortuitement», lorsque la visite de M. Breton a fait les manchettes.

«Fortuitement, ici, ailleurs, dans ma vie civile, avec n'importe qui qui lit le journal, qui pourrait, compte tenu de ce que sont mes fonctions, avoir le désir de formuler un commentaire sur ce sujet-là à mon endroit», a-t-il dit.

Les péquistes ont soutenu jeudi que le BAPE est un organisme consultatif et non pas judiciaire, contrant ainsi les arguments des libéraux voulant que M. Breton se soit ingéré.

Les libéraux ont de leur côté développé que M. Breton a nui à l'indépendance de l'organisme en s'y rendant le 24 octobre dernier.

«Vous saviez qu'il y avait une commission parlementaire, ça ne vous a pas intéressé de savoir si l'indépendance du BAPE avait été mise en jeu par votre prédécesseur ou non, ça ne manifestait aucun intérêt pour vous», a affirmé le député libéral Pierre Paradis à M. Blanchet.

Limitant la couverture médiatique, le gouvernement a usé de ses pouvoirs pour que les travaux se déroulent dans la plus petite salle de l'Assemblée nationale, où aucune retransmission télé n'est disponible.

La présidente de la commission, la députée libérale Fatima Houda-Pépin, a autorisé la captation d'images de la première minute d'intervention de chacun des élus appelés à prendre la parole, après quoi elle a demandé aux caméramans de sortir de la salle, où les journalistes ont cependant pu demeurer afin de suivre les échanges.

Le député de la Coalition avenir Québec Éric Caire a déclaré qu'il était «scandalisé» par le choix de tenir la commission à l'écart des caméras.

«Forcer la commission à venir se cacher dans une salle où on va exclure les médias, où le public en général ne pourra pas suivre nos travaux, c'est un manque de respect pour la commission, c'est un manque de respect nos concitoyens et ça jette un discrédit sur l'action du gouvernement», a-t-il lancé.

Dans son témoignage, M. Blanchet a répété que M. Breton avait effectué une visite de «courtoisie» au BAPE, le 24 octobre dernier, même si un reportage a ensuite affirmé qu'il avait intimidé les commissaires.

«Je ne crois pas avoir lu que mon collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques serait allé intervenir dans un dossier, et ma compréhension est qu'il a fait une visite de courtoisie au BAPE», a-t-il dit.

M. Breton a nié tout écart, mais il a dû démissionner, fin novembre, à la suite d'une nouvelle controverse concernant des loyers impayés et des infractions au Code de la route.

Juste avant d'être assermenté pour son témoignage, à la demande de M. Paradis, M. Blanchet a fait référence à son passé d'imprésario pour qualifier les travaux de la commission.

«J'ai été assez longtemps dans le monde des arts pour savoir c'est quoi, du théâtre» a-t-il laissé tomber avant de déclarer sous serment qu'il dirait toute la vérité.

Par ailleurs, à l'ouverture des travaux, M. Paradis a révélé que deux de ses anciens attachés politiques, alors qu'il était ministre de l'Environnement de 1989 à 1994, sont maintenant des commissaires du BAPE. Michel Germain et Denis Bergeron seront d'ailleurs entendus par la commission.

M. Paradis a aussi affirmé qu'il avait offert la présidence du BAPE à l'ancien journaliste Louis-Gilles Francoeur, nommé vice-président de l'organisme alors que M. Breton était en fonction, l'automne dernier.