Un gouvernement libéral dirigé par Philippe Couillard abolirait la taxe santé qui a donné tant de maux de tête à Pauline Marois l'automne dernier. La cotisation de 200$ par personne, instaurée sous Jean Charest par son adversaire Raymond Bachand, est une solution facile, mais bien éphémère, estime l'ancien ministre.

Dans une longue entrevue accordée hier à l'équipe éditoriale de La Presse, Philippe Couillard a volontiers pris ses distances des décisions de son parti en matière de santé.

En santé, le gouvernement Charest a réalisé beaucoup: il a fait disparaître l'attente pour le traitement du cancer et réduit les délais pour des opérations auparavant difficiles d'accès. Mais lors de la campagne électorale de 2003, Jean Charest avait promis de tout régler dans ce secteur délicat. Les réalisations étaient donc condamnées à paraître insuffisantes, observe M. Couillard. «Ce qu'il faut, c'est un nombre restreint d'engagements réalistes.»

Insatisfaction

Selon Philippe Couillard, il faudrait «progressivement se défaire» de cette taxe, qui fournit 1 milliard par année. L'argent pour la santé devrait venir du fonds consolidé, comme toutes les autres dépenses. Partout où ce genre de taxe a été mis en place, le scénario s'est répété: beaucoup d'argent dans les deux ou trois premières années, puis le réseau tient cet ajout pour acquis.

«Ça devient de moins en moins productif en service et ça suscite plus d'insatisfaction chez les citoyens», observe M. Couillard, en invoquant un constat récent de l'Ontario.

«Le système où le financement est assuré par les fonds généraux du gouvernement est un bon système», affirme-t-il.

Au passage, Philippe Couillard s'engage à faire une très vaste réforme en santé. Les fédérations de médecins devront pousser à la roue pour améliorer la qualité des soins.

Pas question de rouvrir les ententes de rémunération, valides jusqu'en 2017, mais les sommes injectées devront viser l'amélioration des soins. La rémunération des médecins est devenue la principale cause de la croissance des coûts en santé, observe-t-il.



Arthur Porter

Il écarte par ailleurs de la main ses relations avec Arthur Porter, ex-patron du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), recherché par la police.

«À l'époque, Arthur Porter était une star, il avait rééquilibré les finances du CUSM, il avait été choisi par le conseil d'administration après avoir traversé trois filtres de contrôles», a précisé M. Couillard.

Philippe Couillard n'a pas beaucoup de sympathie pour le gouvernement, qui se débat avec le prochain sommet sur le financement des universités et les droits de scolarité.

«Ils vont payer le prix de leur attitude durant le conflit. Ils ont pris parti pour les manifestants, sont descendus dans la rue en portant leur symbole. Un parti politique responsable ne peut se mettre dans cette situation, laisser croire que la désobéissance civile est justifiée.»

«Consensus ne veut pas dire unanimité, on confond trop souvent les deux», a-t-il martelé à plusieurs occasions.

Signe probable de son avance, il joue de prudence et évite d'attaquer ses adversaires. «Je suis le seul des trois candidats à être bénévole!» a-t-il cependant noté - MM. Bachand et Moreau font campagne tout en étant députés.

Parti à rebâtir

Il a répété son engagement à revenir comme candidat libéral même s'il mordait la poussière le 17 mars.

«C'est curieux qu'on me demande ça. Je ne suis pas le plus douteux sur cette question», a-t-il affirmé - une allusion à Raymond Bachand, qui cache mal son intention de partir s'il est défait.

Il refuse de préciser s'il compte se présenter rapidement ou s'il attendra pour assurer la reconstruction du PLQ, qu'il estime urgente. Le parti doit surtout reconstituer sa base auprès des francophones et des jeunes, selon lui.

Bien que le PLQ ait récolté 50 députés, il n'est pas question de tenir la réélection pour acquise. «Ce serait une erreur de penser qu'on a seulement à changer de chef et que l'alternance fera le reste. Il faut montrer à la population qu'on a reçu le message.»