Dans la course à la succession de Jean Charest, certains bureaux d'avocats de Montréal ont choisi leur camp. Une étude attentive de la liste des donateurs aux candidats à la direction du Parti libéral du Québec (PLQ) montre que Philippe Couillard a bénéficié d'un appui étonnant de la part d'un grand cabinet montréalais.

La semaine dernière, la liste des contributeurs de tous les candidats comportait 438 noms. L'ancien ministre de la Santé avait obtenu une contribution financière - maximale - de 500$ de pas moins de 25 avocats du bureau McCarthy Tétrault de Montréal, dont l'ex-bâtonnier Gérald Tremblay.

Chaque nom de la liste, en date du 6 décembre, a fait l'objet d'une recherche sur Google.

Ironiquement, le patron de ce cabinet pour le Canada, Me Marc-André Blanchard, a récemment publié une lettre ouverte pour manifester son appui à... Raymond Bachand. Comme il réside à Toronto, il a dû se contenter de bons voeux. L'associée principale de McCarthy, Kim Thomassin, a quant à elle pu verser 1000$ à la campagne Bachand.

Un avocat de Québec, Marc Dorion, conservateur de longue date, a joué un rôle important dans l'enthousiasme de ses collègues de McCarthy pour la campagne Couillard puisqu'il a organisé une réunion de financement.

En ce qui concerne Raymond Bachand, on ne trouve pas de contributions massives provenant du même cabinet d'avocats. Sept avocats de Fraser Milner Casgrain ont sorti leur chéquier pour donner 1000$ à l'ancien ministre des Finances - le maximum accepté dans la campagne Bachand. Le frère de M. Bachand, Jean-Claude, travaille chez Fraser. Par ailleurs, même si l'organisateur en chef de M. Bachand, Jean Masson, est chez Fasken Martineau, seulement deux avocats de cette firme ont contribué à sa caisse, dont l'ex-sénateur libéral Francis Fox.

Harold Fortin, porte-parole de la campagne de Couillard, ne peut expliquer les raisons d'une concentration élevée de donateurs dans un bureau en particulier. «Tout le monde peut donner, ce sont des contributions individuelles. M. Couillard respecte les règles de la campagne et s'est même imposé un plafond de 500$, alors que le maximum, selon la loi, est de 1000$», a-t-il soutenu.

Il y a toujours un décalage entre les sommes inscrites sur la liste du Directeur général des élections et les chèques reçus.

Ironiquement, deux contributeurs à la campagne Couillard ont débordé d'enthousiasme et offert plus que ce que souhaite leur poulain. Robert Dupont et Daniel Lalonde ont en effet fourni chacun 1000$, pour une campagne théoriquement plafonnée à 500$.

Dans le camp Couillard, on estime avoir atteint 240 000$ en dons, qui proviennent de 700 contributeurs. Du côté de Raymond Bachand, on accuse un retard, puisqu'on a amassé 172 000$ d'environ 300 contributeurs. Parmi les donateurs, on compte Yvon Charest, patron de l'Industrielle Alliance. André Desmarais, Robert Gratton et Edward Johnson, de Power Corporation, ont tous trois donné 1000$ à M. Bachand. John Rae et Peter Kruyt, aussi de Power, ont fait de même, avec respectivement 500$ et 700$. Jean-Marc Eustache, un des fondateurs d'Air Transat, et Gilbert Rozon, de Juste pour rire, ont également donné 1000$ à la campagne Bachand.

Amis comptables

C'est chez les comptables que Raymond Bachand fait recette. En effet, 14 contributeurs de sa campagne viennent de la maison Ernst & Young. La Banque de Montréal, avec quatre donateurs - dont le président Jacques Ménard, responsable du financement de Bachand -, n'a pas oublié l'ancien ministre. La femme et le fils de M. Ménard ont aussi fourni 1000$.

M. Couillard a trouvé de son côté huit amis chez Ernst. La firme comptable a toujours eu un intérêt certain pour la chose publique; on y avait trouvé huit professionnels pour contribuer à la caisse de la Coalition avenir Québec (CAQ) quand elle n'était qu'un organisme à but non lucratif. La CAQ avait toutefois eu 46 contributeurs du même bureau d'avocats, BCF. Cette fois, on ne compte qu'un seul donateur de cet important bureau - Me Dominic Larose pour M. Bachand. Ce dernier a par contre obtenu cinq contributions des avocats de Davies Ward Phillips & Vineberg, où travaille l'ancien premier ministre Lucien Bouchard. L'ancien péquiste a même l'appui de Lawrence Wilson, avocat en vue et vétéran du PLQ.

Norton Rose, géant du droit commercial, a quatre contributeurs, tous pour M. Couillard.

Toutefois, les donateurs de firmes d'ingénieurs-conseils sont rares en cette période où elles se retrouvent sur la sellette. Michael Novak, vice-président de SNC-Lavalin, a donné 500$ à Philippe Couillard. Sa femme, l'ex-ministre de la Justice Kathleen Weil, a fait de même.

Étrangement, quand Philippe Couillard parle, les syndics tendent l'oreille. L'ancien ministre de la Santé a récolté 11 dons de professionnels du bureau montréalais RSM Richter. Un appui étonnant pour M. Couillard: Claude Garcia, davantage associé à l'Action démocratique du Québec, avant la fusion avec la CAQ, a donné 500$. Simon Pierre Diamond, ancien adéquiste devenu libéral, appuie aussi l'ancien médecin.