Le gouvernement Marois est « incompétent » et « érige la cachette en système », mais pas au point où il faille le renverser, estime le Parti libéral. La cohabitation avec le gouvernement péquiste minoritaire « doit durer un certain temps », selon lui.

En conférence de presse pour dresser le bilan de la session parlementaire, qui prend fin aujourd'hui vendredi, le chef intérimaire du PLQ, Jean-Marc Fournier, a soutenu  que les Québécois ne veulent pas d'élections. Et même lorsque le PLQ aura élu son chef, en mars, il n'entend pas nécessairement faire tomber le gouvernement, a-t-il dit.

«Qu'on ait un chef ou pas, l'aspiration des Québécois demeure: ils veulent que nous puissions travailler ensemble et nous mettre d'accord.» La cohabitation peut fonctionner, selon lui: le gouvernement s'est rangé à l'avis du PLQ dans le cas de la loi abolissant le placement syndical.

Le contexte pourrait changer « si le gouvernement va à des extrêmes insoutenables » et qu'il y a «un trop-plein», mais on n'en est pas là. «Il faut essayer de travailler ensemble. Et ça doit durer un certain temps quand même. Chacun doit y mettre du sien», a-t-il souligné.

Jean-Marc Fournier a accusé le chef caquiste François Legault de s'être « déguisé en Grincheux qui n'aime pas Noël » en cherchant à faire tomber le gouvernement lors du vote sur le budget. Le PLQ n'a envoyé en Chambre qu'une poignée d'élus pour voter, ce qui a permis au gouvernement Marois de survivre.

M. Fournier affirme que la commission Charbonneau « n'est pas un considérant » dans le peu d'empressement du PLQ à retourner en élections.

Selon Jean-Marc Fournier, le gouvernement Marois a fait preuve d'incompétence dans le dossier de la taxe santé et avec ses «dangereuses» compressions aux universités, par exemple. Il fait des « cachettes » en gardant secret un rapport sur les redevances minières qui est gênant pour le PQ, a-t-il ajouté.

«Un manque de jugement», dit Legault

De son côté, le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, estime que Pauline Marois a démontré son manque de jugement au cours de la session. Il en veut pour preuve la double nomination d'André Boisclair et le choix de Daniel Breton, « une bombe à retardement », comme ministre de l'Environnement. Le premier, devenu délégué général à New York, a finalement renoncé au poste de sous-ministre à vie; le second a dû démissionner.

Le gouvernement est «déconnecté» et «gère par essais et erreurs», croit le chef caquiste. Il a fait plusieurs promesses électorales « irréalistes » qu'il a été forcé de « mettre à la poubelle ».

« Le PQ ne va nulle part » notamment parce qu'il ne peut faire avancer son option souverainiste, a-t-il avancé.

Un «bon point» à ses yeux: le gouvernement a accepté de plafonner les dépenses électorales des partis politiques, comme le réclamait la CAQ - preuve, selon M. Legault, de l'efficacité de son équipe. En revanche, le gouvernement «n'a pas été foutu de présenter le début d'une mesure» sur le financement des partis politiques municipaux, a tonné M. Legault.

François Legault ne s'attend pas à ce qu'il y ait des élections au cours de la prochaine année. Le PLQ n'aura pas de chef avant le mois de mars et ne voudra pas subir de test électoral pendant la commission Charbonneau, a-t-il dit. M. Legault estime qu'il faut « changer de gouvernement », mais il évaluera « au cas par cas » dans les prochains mois s'il votera pour faire tomber le gouvernement en Chambre.

Il compte présenter des mesures de relance économique au début de l'année prochaine.

Québec solidaire

Si le gouvernement péquiste continue de «se soumettre aux diktats du marché des PricewaterhouseCoopers de ce monde» et des «clubs 357 de la finance», il rendra encore plus improbable une alliance souverainiste, a pour sa part prévenu  Amir Khadir.

La semaine dernière, les délégués de Québec solidaire (QS) ont rouvert le débat sur une possible alliance électorale avec le Parti québécois. «Mais ça se danse à deux», a rappelé Françoise David, co-porte-parole du parti, lors de son bilan de fin de session.

Les solidaires ont été refroidis par le dernier budget Marceau, qui aurait pu être signé par les libéraux, a raillé M. Khadir.

Il dénonce «l'obsession du déficit zéro». L'équilibre budgétaire n'est pas une mauvaise chose, mais pour l'atteindre, il faut selon lui augmenter les redevances minières ou sur l'eau, et puiser davantage dans les poches des entreprises et des citoyens plus fortunés.

Pour légiférer, le gouvernement péquiste a besoin de l'appui de l'un des deux partis à sa droite. QS avoue que ce contexte diminue son influence en Chambre. Mme David mise donc sur l'opinion publique. «Si le PQ va trop à droite, beaucoup d'électeurs vont décrocher», a-t-elle prédit.

M. Khadir croit que la première ministre Pauline Marois a gaspillé une belle occasion, cet automne. Le Parti libéral (PLQ), en pleine course à la direction, ne peut pas renverser le gouvernement. «Chaque fois qu'il y avait un vote (de confiance), une vingtaine de libéraux allaient aux toilettes», a-t-il rappelé.

Les solidaires ont été encouragés par les premiers gestes de Mme Marois: elle a fermé la centrale nucléaire Gentilly-2, annulé la hausse des droits de scolarité, abrogé la «loi 12» et annulé le prêt à la mine d'amiante Jeffrey. Après les louvoiements du PQ en campagne électorale au sujet de l'amiante, M. Khadir avoue avoir été agréablement «surpris» par cette décision rapide.

Autres «victoires», selon QS: le BAPE générique sur l'uranium et l'entente avec les retraités de la papetière White Birch.

Mais pour le reste, le gouvernement péquiste a montré dans son budget qu'il ne se distingue pas des libéraux sur les «enjeux systémiques».

Même si Québec solidaire n'est pas encore un parti reconnu à l'Assemblée nationale, ses deux députés croient qu'ils ont réussi à «faire avancer des dossiers qui autrement n'auraient pas trouvé d'intérêt particulier», notamment celui de la pauvreté. Elle a déposé un projet de loi pour exclure du calcul de l'aide sociale les pensions alimentaires pour enfant. Le PQ proposait la même chose lorsqu'il était dans l'opposition. La ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, Agnès Maltais, promet de s'y attaquer, mais elle refuse de donner un échéancier.

QS a aussi de nouveau présenté son projet de loi pour créer Pharma-Québec. Sa demande de mettre fin à la règle des 15 ans pour les pharmaceutiques a «enfin été entendue», se félicite M. Khadir.

Mme David s'attribue en partie un amendement au projet de loi 2 sur le financement des partis politiques provinciaux, qui permettra de ne pas désavantager les nouveaux partis. M. Khadir a rappelé que la première mouture du projet de loi «améliorait le rapport de force de QS», et qu'il n'a donc pas agi dans un intérêt partisan en le modifiant.