Devant une levée de boucliers rapide, la ministre Diane de Courcy a assuré que la loi 101 ne s'appliquerait pas aux garderies de la même façon qu'aux écoles primaires et secondaires.

Responsable de l'application de la Charte de la langue française, Mme de Courcy a été contrainte de préciser les projets de son gouvernement après une entrevue accordée par sa collègue Nicole Léger à La Presse Canadienne. La ministre de la Famille avait affirmé que le gouvernement Marois planchait sur l'application de la loi 101 aux enfants d'âge préscolaire.

«Il n'est pas question d'appliquer la loi 101 dans les CPE telle qu'elle est appliquée dans les écoles primaires ou les écoles secondaires», a affirmé Mme de Courcy au sortir du Conseil des ministres d'aujourd'hui, admettant qu'il s'agissait d'un «sujet préoccupant pour tout le monde». La ministre a affirmé que cette question devait faire l'objet d'un équilibre entre l'intégration des petits allophones au français et la continuité avec le milieu familial.

Mme de Courcy a coupé court au point de presse après une seule question, une pratique très inhabituelle.

La ministre Léger, pour sa part, a refusé de revenir ses déclarations tant à l'entrée qu'à la sortie de la réunion. C'est sa collègue qui a expliqué son geste. «Mme Léger a pris dans le programme du PQ une dimension qui la concernait», a affirmé Mme de Courcy. «En temps et lieu, je vais soumettre les choix qui vont être faits par le gouvernement.»

Projet critiqué

Le projet d'application de la loi 101 aux garderies est dogmatique et relève de l'improvisation, ont affirmé ce matin des députés d'opposition.

Le chef par intérim du Parti libéral du Québec, Jean-Marc Fournier, a tiré à boulets rouges sur un projet «sorti de je-ne-sais-pas-où», «une autre annonce improvisée».

Il s'agit d'«une autre atteinte à la liberté individuelle», selon M. Fournier. «Il faudrait bien nous dire comment une mesure qui vise à enlever des choix aux Québécois va favoriser (l'intégration des immigrants)», a-t-il affirmé, en marge d'un caucus des députés libéraux.

M. Fournier ne s'attend toutefois pas à voir le projet se concrétiser. «Je vous annonce que probablement ce soir, Mme Marois va dire que non, ils ne feront pas ça», a-t-il blagué, sourire en coin.

Daniel Ratthé, porte-parole de la Coalition avenir Québec, a annoncé que la Coalition avenir Québec (CAQ) voterait contre tel amendement à la loi 101 si l'Assemblée nationale avait à l'étudier. «Je vois mal comment le gouvernement pourrait s'immiscer dans les CPE», a-t-il affirmé. «Je ne vois pas pourquoi on se sentirait en danger parce que des enfants qui ont zéro, six mois, un an, un an et demi ne parlent pas le français.«»

L'ancienne ministre responsable de la Charte de la langue française, Christine St-Pierre, a elle aussi critiqué le projet de celle qui lui a succédé.

«Je considère que c'est encore du dogmatisme d'essayer de faire en sorte qu'un poupon qui a six mois dans une garderie soit obligé d'apprendre le français», a fait valoir la députée de l'Acadie. «Le poupon, ce n'est pas ça qu'il demande. Il demande à être soigné, il demande à avoir des soins et a être cajolé.»

Le député Marc Tanguay, a contrario, a refusé de s'en prendre à l'idée, se limitant à faire valoir qu'un certain équilibre devait être maintenu entre intérêts collectifs et libertés individuelles.