Il avait raté sa sortie; il voudra que sa «rentrée» politique se passe sous de meilleurs auspices. Philippe Couillard entend clarifier d'entrée de jeu les circonstances de son départ de la vie politique, en juin 2008.

Alors qu'il était toujours ministre de la Santé, Philippe Couillard avait amorcé des échanges avec son futur employeur, Persistence Capital Partners, un fonds de gestion en santé. Le commissaire au lobbyisme, André C. Côté, avait noté dans son rapport de mars 2009 que Philippe Couillard avait entrepris des discussions avec Stuart et Sheldon Elman, deux patrons du fonds et promoteurs de cliniques privées, deux mois avant d'annoncer sa démission du Conseil des ministres.

Or, il semble que, avant ces échanges, Philippe Couillard ait vérifié leur légitimité auprès du conseil exécutif (techniquement, son employeur quand il siégeait au gouvernement), qui lui avait donné le feu vert notamment parce que le groupe en question n'entretenait aucune relation d'affaires avec le gouvernement du Québec. Au surplus, le commissaire André Côté avait reconnu à l'époque que les futurs employeurs du ministre Couillard n'avaient pas tenté d'influer sur les décisions gouvernementales.

Préparatifs fébriles

Philippe Couillard annonce officiellement son retour en politique ce matin. Chez ses partisans, on était dans les heures fébriles des préparatifs, hier. Sa coprésidente de campagne sera l'ex-ministre de l'Immigration Kathleen Weil, que pensait bien avoir capturée Raymond Bachand.

Pour l'économie, l'ancien ministre Michel Audet ne sera jamais loin, a appris La Presse. Sur le dossier constitutionnel, Benoît Pelletier, ex-collègue plutôt nationaliste, mettra son expertise à profit.

Comme ses adversaires Raymond Bachand et Pierre Moreau, il alignera une brochette de députés à son point de presse, au Centre des sciences, dans le Vieux-Port de Montréal. Mais son avance ne se verra pas sur la photo de famille: en fond de scène, il est parvenu à recruter les organisateurs clés des dernières campagnes électorales du PLQ. Ce sera un atout indéniable en prévision de la guerre de tranchées qui débute - des assemblées de choix de délégués dans chacune des 125 circonscriptions, des rassemblements qu'il sera difficile d'encadrer pour la permanence du PLQ. Raymond Bachand a derrière lui Andrée Simard (la veuve de l'ex-premier ministre Robert Bourassa) et Lise Bacon, comme une caution du regretté premier ministre. Philippe Couillard a aussi des appuis enracinés au PLQ - Ronald Poupart, un proche collaborateur, fait des téléphones discrètement.

Un passage important

Ses explications sur son départ en 2008 seront-elles concluantes? La question est névralgique. Ce sera un passage important. Dans son entourage, on reconnaît facilement que cette sortie ratée de 2008 est le seul nuage. C'est la seule objection que font spontanément ceux qui hésitent à l'appuyer, chuchote-t-on dans son camp. Après plus de cinq ans comme ministre de la Santé, Philippe Couillard voulait passer à autre chose. Et vite. À l'époque, il fallait remonter à Maurice Duplessis pour trouver un ministre de la Santé avec une telle longévité, ont rappelé les médias au moment de son départ. Il n'a pas claqué la porte, mais il l'a probablement fermée trop rapidement, sans explications. Le jour de sa démission, il a quitté si vite l'Assemblée nationale qu'il en a oublié son attachée de presse, Marie-Ève Rivard, qui l'a attendu pendant plus d'une heure, en vain, à la porte du Salon bleu.

Il y a bien sa proximité avec cet étrange «associé» Arthur Porter, l'ancien patron du CUSM, qui a quitté son poste à la fin de l'an dernier. Mystérieusement, le Dr Porter reste silencieux, aux Bahamas, pendant qu'au Québec, son rôle dans l'attribution des contrats à SNC-Lavalin pour le nouvel hôpital anglophone paraît douteux.