Le gouvernement minoritaire du Parti québécois (PQ) sera forcé de faire des compromis sur son programme, ont reconnu ses députés à l'occasion de leur assermentation, lundi.



«Sincèrement, on est tous conscients du résultat. Les Québécois ont fait leur choix. Un gouvernement minoritaire implique des concessions. Ça implique des compromis, ça implique du donnant-donnant. On arrive avec un esprit d'ouverture», a dit le député Bernard Drainville.

Dans son discours, la première ministre désignée Pauline Marois a promis «d'en finir avec la politique de la division», sans préciser à quoi elle faisait référence. Elle n'a pas répondu aux questions par la suite. Lors de l'assermentation, les députés péquistes ont dû jurer «d'être fidèle et de porter vraie allégeance à Sa Majesté la reine Élisabeth II». Pour la cérémonie, le PQ a fait retirer le drapeau canadien du Salon rouge. Serge Cardin, tombeur de Jean Charest dans Sherbrooke, a été parmi les plus applaudis. Dans l'entourage de Mme Marois, on dit ne pas savoir si l'unifolié sera ramené au Salon rouge pour les travaux parlementaires. Les précédents gouvernements péquistes l'en avaient retiré durant tout leur mandat.

La composition du Conseil des ministres sera annoncée demain.

«Du cas par cas»

Durant la campagne électorale, les promesses concernant la création d'une charte de la laïcité et le renforcement de la Charte de la langue française ont inquiété les communautés anglophones et allophones. Les mesures promises devraient figurer dans les projets de loi, a indiqué François Gendron, doyen de la députation péquiste. Mais le PQ pourrait plier en commission parlementaire. «Il faut déposer nos convictions telles qu'elles sont, et ensuite prendre acte de la réalité objective de la situation du Parlement minoritaire. Il faut avoir cette souplesse de fonctionnement», a-t-il indiqué.

Le PQ est-il prêt à faire des compromis sur sa nouvelle Charte de la langue française? «Je ne veux pas aller sur le spécifique aujourd'hui, a répondu M. Drainville. On est dans un état d'esprit où on sait qu'il va falloir faire des compromis. Les compromis devront venir de notre côté, mais aussi des autres partis.»

«La CAQ peut nous aider assez rapidement, estime M. Cardin. On sait que certains dossiers avec les libéraux peuvent être plus difficiles.» Ancien député du Bloc québécois, il a vécu sous un gouvernement minoritaire à Ottawa. Ce sera «du cas par cas», prévoit-il.

«Au chapitre de la laïcité et de l'égalité homme-femme, on a des points de rencontre aussi, a observé Stéphane Bédard, qui était leader parlementaire dans l'opposition. L'important, ça va être de dire: "Voici nos couleurs", puis de discuter et voir les terrains d'entente. Il y en a dont je ne connais pas l'opinion encore, donc on va voir.»

«Sur la question de la langue et de la laïcité, il y a des points de convergence entre la Coalition avenir Québec, Québec solidaire et nous. Ils ne sont pas aussi ambitieux que nous, mais sur certains points, ils ont des volontés qui sont convergentes», a souligné Jean-François Lisée, sans vouloir spéculer davantage.

«Si on réalise que, contrairement à Mme Marois, les autres partis ne sont pas en mode d'écoute et de dialogue, il faudra s'ajuster. Mais c'est clair que nous, on veut travailler de la façon la plus consensuelle possible», a quant à lui promis Stéphane Bergeron.

Droits de scolarité

Alors que des associations liées à la CLASSE envisagent de tenir une journée de grève par mois, Léo Bureau-Blouin leur répond que le PQ entend «passer de la parole aux actes» mais qu'il faut lui «laisser le temps de le faire». «Beaucoup d'étudiants et leurs familles peuvent crier victoire. La hausse des droits de scolarité sera abolie dès le premier conseil des ministres», a-t-il affirmé.

Un sommet sur l'enseignement supérieur se tiendra dans les 100 prochains jours. Pauline Marois y proposera l'indexation des droits de scolarité, une hausse que rejette la CLASSE. Léo Bureau-Blouin a réitéré qu'il entend «faire la promotion du gel» dans son parti, mais il se dit «ouvert aux compromis».

- Avec Denis Lessard