La ministre Michelle Courchesne aura été la cible numéro un de l'opposition en Chambre, en cette fin de session parlementaire houleuse, qui se terminera vendredi prochain.

Si on se fie aux dernières semaines, il y a fort à parier que cette session, qui pourrait bien être la dernière avant le prochain rendez-vous électoral, s'achèvera dans le tumulte et un climat de forte tension politique.

Vendredi, le président de l'Assemblée nationale, Jacques Chagnon, s'est amusé à qualifier la période de questions d'«assez virile».

Une fois de plus, la ministre Courchesne en a fait les frais, accusée de favoritisme et de gérer les fonds publics de façon arbitraire, en faisant fi de l'avis des fonctionnaires, qu'il s'agisse de la distribution de places en garderie, de subventions aux installations sportives ou de l'attribution de contrats dans la municipalité qu'elle représente. La veille, le député caquiste Éric Caire lui reprochait son laxisme durable dans l'octroi de subventions à des écoles privées confessionnelles qui défient la loi et le régime pédagogique année après année, sans encourir de sanctions.

Jour après jour, les partis d'opposition font monter la pression d'un cran, tirant dans toutes les directions et rivalisant d'adresse pour la faire trébucher et la forcer à démissionner. Par la bande, on tente de ternir l'image du premier ministre Jean Charest, accusé de cautionner le style de gestion controversé de la vice-première ministre.

Vendredi, le député péquiste de Chambly, Bertrand St-Arnaud, a interpellé le premier ministre, comparé à «l'empereur Néron qui regarde Rome brûler», pour lui demander comment, «après deux blâmes sévères du vérificateur général, peut-il un seul instant maintenir cette personne dans ses fonctions actuelles?».

L'opposition péquiste revient à la charge constamment pour rappeler à la ministre de l'Éducation qu'en moins de six mois deux rapports du vérificateur général l'ont blâmée sévèrement pour sa gestion arbitraire des fonds publics, de même que son manque de rigueur dans l'application des règles, pour l'attribution de 18 000 places en garderie et l'octroi de 363 millions $ de subventions à diverses infrastructures sportives.

Vendredi, un cas apparent de conflit d'intérêts a été soulevé à nouveau, autour d'une subvention de 7,3 millions $ donnée à l'entreprise Di Lillo Construction, dont le propriétaire est un contributeur à la caisse du Parti libéral du Québec, a rapporté l'opposition péquiste.

L'aide financière était pour l'érection du Centre d'activités physiques et communautaires de l'Est. Le vérificateur général avait noté que trois dirigeants du centre étaient aussi des administrateurs de Di Lillo Construction. M. St-Arnaud a aussi rappelé que le vérificateur général avait indiqué qu'un autre constructeur avait été écarté de l'appel d'offres sans raison valable.

La ministre Courchesne a répliqué que «l'appel d'offres a été public. Et ceux qui voulaient soumissionner pouvaient soumissionner».

Le député péquiste de Gouin, Nicolas Girard, a enchaîné aussitôt dans un autre dossier, pour rappeler encore à la ministre que le vérificateur général avait noté qu'à l'époque où elle était responsable de la Famille, en 2008, elle avait choisi des projets totalisant 3700 places de garderie «à l'encontre de l'avis de son ministère».

«Les faits sont tellement accablants que la députée de Fabre n'ose même plus se lever pour se défendre», selon M. Girard.

Comme il a fait à maintes reprises, il a réclamé encore la liste des 68 projets de garderie retenus alors par les fonctionnaires, mais rejetés par la suite par la ministre Courchesne, à la surprise du vérificateur.

«Si le gouvernement garde secrète cette liste, est-ce que c'est parce que cette liste va mettre fin à la carrière politique de la députée de Fabre?», s'est interrogé le député péquiste.

La circonscription de la ministre, Fabre, est située à Laval, un territoire de prédilection pour les transactions douteuses, a estimé par ailleurs l'opposition péquiste, associant la présidente du Conseil du trésor à d'autres sujets controversés.

La Ville de Laval, a calculé le député, a accordé pour près de 65 millions $ de contrats pour deux usines d'eau potable à une compagnie à numéro propriété de Tony Accurso, dont les entreprises avaient précédemment reconnu leur culpabilité pour une fraude fiscale de 4,1 millions $.

La preuve est donc faite, a conclu M. Girard, que les lois 35 et 73, adoptées pour nettoyer le processus d'attribution de contrats publics, «ne fonctionnent pas».

La ministre du Travail, Lise Thériault, s'est levée pour réitérer qu'elle planchait sur un projet de révision de la loi 35, pour qu'elle combatte encore plus efficacement la fraude dans l'industrie de la construction.

Parallèlement, la ministre Courchesne a plusieurs fers au feu d'ici la fin de la présente session, et elle devra encore en découdre avec l'opposition dans l'espoir de faire adopter rapidement le projet de loi 56 visant à éliminer l'intimidation et la violence à l'école. Jusqu'à maintenant, l'étude du projet de loi progresse bien et la ministre est ouverte aux amendements présentés par l'opposition.