Line Beauchamp a modifié le processus d'attribution des subventions pour les infrastructures sportives lorsqu'elle a succédé à Michelle Courchesne à l'Éducation, à l'automne 2010. Sous son règne, donc jusqu'à son départ le 14 mai dernier, le cabinet politique ne faisait pas un premier élagage des projets.

Michelle Courchesne se retrouve au coeur d'une tempête politique à la suite d'un rapport embarrassant du vérificateur général déposé la semaine dernière à l'Assemblée nationale. L'opposition la soupçonne d'avoir fait du favoritisme et réclame sa démission.

Le vérificateur général (VG) Michel Samson a révélé de graves lacunes dans la gestion du Fonds pour le développement du sport. Le cabinet de Mme Courchesne a choisi lui-même les projets qui seraient analysés par les fonctionnaires.

Entre 2006 et 2010, 418 des 918 projets de construction déposés au ministère de l'Éducation ont été rejetés d'emblée par le cabinet politique sans même avoir fait l'objet d'une analyse de la part des fonctionnaires. Or ces projets «ont trait à des organismes, à des installations et à des travaux similaires à d'autres projets qui ont été subventionnés [...]. Ainsi, rien ne motive à notre avis cette absence d'analyse», écrit le vérificateur général. Selon lui, «c'est sûr qu'il y a une certaine iniquité là-dedans».

Michelle Courchesne a présidé la phase I du Fonds pour le développement du sport, en vigueur jusqu'en 2010. Line Beauchamp lui a succédé en août de la même année. Elle a été responsable de la phase II.

Or les règles d'octroi des subventions ont changé sous sa gouverne, a indiqué une source libérale. Le cabinet de Mme Beauchamp ne faisait pas une présélection des projets que les fonctionnaires devaient analyser. Ceux-ci recevaient les demandes de subventions, vérifiaient l'admissibilité des projets et les analysaient en fonction d'un certain nombre de critères. Ils envoyaient ensuite les dossiers au cabinet politique. La ministre décidait alors quels projets seraient subventionnés. Elle veillait à ce que les subventions soient réparties équitablement dans tout le Québec, a expliqué une source bien au fait du dossier.

Appels à la démission

L'opposition veut la tête de Michelle Courchesne, blâmée deux fois en six mois par le vérificateur général. L'automne dernier, la ministre a été critiquée au sujet de l'attribution de 18 000 places en garderies en 2008, au moment où elle était à la tête du ministère de la Famille.

Pour le chef caquiste François Legault, si le premier ministre Jean Charest la maintient en poste, «c'est comme si on laissait le renard garder le poulailler».

«Il y a deux rapports accablants qui dénoncent la gestion de la ministre. Elle est responsable du Conseil du Trésor. C'est inconcevable qu'elle puisse demeurer en poste. Quand le premier ministre va-t-il exiger la démission de sa ministre? Comment le premier ministre peut-il cautionner ses explications?», a de son côté lancé la chef Pauline Marois.

Michelle Courchesne a vivement réagi aux attaques de l'opposition, parlant d'elle-même à la troisième personne. «La ministre ne démissionnera pas. Ça fait 40 ans qu'elle travaille. Ça fait 30 ans qu'elle travaille sur son honneur, sur son intégrité, sur sa parole donnée. Ça ne changera pas à l'âge que j'ai», a-t-elle répliqué, sous les applaudissements de ses collègues. «Je n'accepterai en aucun cas que quiconque mette en cause mon intégrité», a-t-elle ajouté. Elle a martelé que le VG exige des «correctifs de nature administrative» et que ceux-ci seront apportés.

De son côté, le premier ministre Jean Charest a fait valoir que «près de 50% des projets [d'infrastructures sportives] sont allés dans des comtés de l'opposition. Il me semble qu'il y a là un fait qui parle par lui-même». Quelque 189 millions de dollars en subventions ont atterri dans des circonscriptions de l'opposition, contre 190 millions dans celles représentées par le PLQ.