Le maire de Québec, Régis Labeaume, repart en croisade. Il veut s'attaquer aux régimes de retraite et aux conditions de travail en changeant la loi.

Il veut en faire un enjeu électoral. «Si j'avais à confectionner la liste (des demandes électorales) du maire aujourd'hui, il se pourrait même qu'il y ait juste ça dessus», a-t-il indiqué mercredi après une allocution devant la Chambre de commerce de Québec.

Les municipalités doivent assumer des dépenses «sans précédent» pour rénover leurs infrastructures, comme les routes. Mais elles sont prises dans une «camisole de force» à cause de la réglementation. La loi leur interdit entre autres de faire un déficit, rappelle-t-il, et 75% de leurs revenus proviennent de l'impôt foncier. Ce qui les contraint de taxer, «quêter» au gouvernement provincial ou encore jouer au promoteur immobilier pour renflouer leurs coffres.

Différents syndicats de la ville de Québec ont soutenu que ce portrait était alarmiste et ont remis en question ces chiffres.

Le maire n'en démord pas. Ses demandes: renverser le rapport de force avec les employés municipaux, entre autres en obtenant le droit de faire un lock-out. Et réformer les régimes de retraite.

Changer le rapport de force avec les syndicats

La ministre du Travail, Lise Thériault, a déjà annoncé que le Code du travail sera revu dans les prochains mois. M. Labeaume veut que les villes puissent élaborer elles-mêmes la liste de leurs services essentiels, ordonner le retour au travail et décréter un lock-out. Calgary, Ottawa et Winnipeg ont déjà ce pouvoir, a-t-il plaidé.

La Fédération québécoise des municipalités (FQM), est en faveur de cette modification du rapport de force.

Mme Thériault s'est bornée à dire que ces demandes seraient examinées par le comité qui doit lui présenter des recommandations l'automne prochain.

Le maire Labeaume veut aussi que le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, modifie la loi pour améliorer le rapport de force des municipalités dans les négociations. Il faudrait selon lui éliminer les planchers d'emplois, faciliter le recours à la sous-traitance et, surtout, aider à résorber le déficit de fonds de pension.

Alléger les régimes de retraite

Les villes et leurs employés devraient assumer à parts égales le déficit de leur fonds de pension, croit M. Labeaume. Il rapporte que selon l'Institut de la statistique du Québec, la contribution des municipalités au régime correspond à 16,9% de la rémunération. Pour le gouvernement provincial, c'est 6,7 %. Le déficit des régimes de retraite de la ville de Québec s'élève à 516 millions $.

«Il est en retard, on a déjà commencé (à chercher des solutions)», a réagi le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard.

Le ministre rappelle que l'ancien président du Mouvement Desjardins, Alban d'Amours, préside un comité sur les régimes de retraite. «C'est facile à nommer les problèmes, ce n'est pas facile à nommer les solutions. Mais faut faire quelque chose, c'est clair», a ajouté M. Lessard.

Le rapport est attendu pour l'automne prochain. On pourrait y recommander de modifier le partage de risque entre les différents cotisants.

Les régimes de retraite sont sous forte pression à cause des faibles taux d'intérêt, des rendements boursiers anémiques et de la hausse de l'espérance de vie.

La FQM et l'Union des municipalités du Québec (UMQ) s'en inquiètent. L'UMQ propose au comité d'Amours de mettre en place des régimes à prestation ciblées, et non déterminées. On ne garantirait pas l'indexation à l'inflation. L'âge de la retraite serait aussi haussé. Ces propositions ont été développées avec Montréal, qui est membre de l'UMQ.

Pas sur la même planète

M. Labeaume a présenté ses positions au maire de Montréal, Gérald Tremblay. Sont-ils d'accord? «On n'est pas sur la même planète», a-t-il répondu avec un long silence. «C'est certain, certain qu'on ne voit pas les choses de la même façon, a-t-il ajouté. Ce matin, (au téléphone), j'ai encore vu le fossé entre nous deux. Peut être que c'est lui qui a raison et que j'ai tort, je ne sais pas. Je vais essayer de me retenir. Merci, salut, c'est assez», a-t-il lancé avant de conclure son point de presse.