Les groupes environnementaux accueillent avec prudence le projet de loi 65, déposé hier, qui définit le cadre juridique pour créer 20% d'aires protégées d'ici à 2020 dans le territoire du Plan Nord.

C'est un «bon geste», mais ce n'est que le «préambule», a dit Nature-Québec. L'organisme rappelle que les cibles, les échéanciers, les mécanismes de consultation et les modes de protection seront seulement définis dans la stratégie. Cette stratégie sera présentée trois mois après l'adoption du projet de loi.

Même si elle accueille «favorablement» le projet de loi, l'Initiative boréale canadienne (IBC) s'inquiète d'y voir apparaître l'expression «utilisation durable des ressources».

L'automne dernier, le ministre du Développement durable, Pierre Arcand, avait proposé d'inclure des «réserves de capital nature» dans le territoire à protéger. Cette catégorie inusitée n'est pas reconnue par l'Union internationale de conservation de la nature. De l'exploitation forestière aurait pu s'y faire. En réaction aux critiques, le ministre avait finalement abandonné cette catégorie, et avait porté de 12% à 20% la superficie d'aires protégées promise. «On espère que l'expression utilisation durable des ressources n'ouvre pas à nouveau cette porte», dit Suzann Méthot, directrice régionale au Québec de l'IBC.

La protection se fera en deux phases. La deuxième portera la superficie du territoire protégé à 50% d'ici à 2035. Cette fois, il ne s'agira pas seulement d'aires protégées, où il est même interdit de construire une route. Il y aura aussi «des zones de chasse, de pêche, d'écotourisme, des choses comme ça», a expliqué M. Arcand. Sept projets-pilotes sont en cours. Le ministre affirme que, «pour l'instant», les activités forestières sont considérées comme étant des «activités industrielles» et devraient donc être exclues de ces territoires protégés.

La Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) estime que le projet de loi comporte des «gains importants», mais partage les inquiétudes de l'IBC. Jérôme Spaggiari, coordonnateur à la SNAP, souligne que le ministre pourrait déjà protéger des territoires comme ceux où se trouvent les rivières Nastapoka ou Broadback. «Les études sont faites, on serait prêts», renchérit Mme Méthot.

Selon le critique du Parti québécois en matière d'environnement, Scott McKay, le projet de loi offre une «protection cosmétique». «Une fois de plus, le gouvernement libéral a créé d'énormes attentes qui se dégonflent peu à peu. Il est désolant que le projet de loi entretienne le flou et alimente la confusion quant aux réelles intentions de protection environnementale projetées par le plan marketing du Nord», a-t-il dit. Selon lui, le projet de loi «fait abstraction» de l'expertise des communautés nordiques.