Le ton a monté à l'Assemblée nationale, hier, au sujet du Plan Nord. Le gouvernement Charest a accusé la chef péquiste Pauline Marois d'avoir menti en alléguant qu'il vendrait au rabais l'hydroélectricité à la société minière Adriana Resources.

Pour la deuxième fois en trois jours, Pauline Marois a ouvert les hostilités de la période des questions avec une attaque contre le Plan Nord. Signe que la chef péquiste a décidé de cibler la carte maîtresse de Jean Charest en cette période préélectorale.

Subvention de 100 millions

Mme Marois a allégué que la société Adriana Resources a obtenu un généreux tarif d'hydroélectricité - 650 mégawatts à 3,6 cents le kilowattheure - pour son ambitieux projet de mine de fer au lac Otelnuk, entre Schefferville et Kuujjuaq. C'est en dessous du tarif de 4,5 cents, réservé aux grands consommateurs industriels qui font de la transformation. «C'est l'équivalent d'une subvention de plus de 100 millions de dollars par année. [...] Pourquoi il faudrait donner notre hydroélectricité?», a tonné la chef péquiste. Mme Marois s'est basée sur des informations contenues dans un rapport technique de la société déposé aux autorités réglementaires.

Jean Charest a nié cette allégation. C'est de la «fabulation», a-t-il lancé en Chambre. «Il n'y a pas de négociation de contrat et le projet n'est pas avancé. Il n'est pas question pour nous, et il ne sera jamais question pour nous, de vendre notre énergie en deçà évidemment du coût marginal [auquel s'ajoutera] un profit», a-t-il dit. Il a reproché à la chef péquiste de ne pas avoir «vérifié l'information». «J'ai des mauvaises nouvelles pour vous, les Québécois feront le choix entre des référendums d'initiative populaire et le Plan Nord. Et je vous garantis une affaire, ils vont choisir le Plan Nord», a-t-il ajouté, donnant un aperçu de son discours électoral.

Après vérifications auprès du PDG d'Hydro-Québec Thierry Vandal, le ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, en a remis lors d'un point de presse. Il a accusé Pauline Marois d'avoir «induit la Chambre en erreur», d'avoir «carrément menti». Il a soutenu que le tarif utilisé par Adriana était une «hypothèse de travail» qui, de surcroît, n'a pas été validée par la société d'État. «Adriana a travaillé avec 3,6 cents, mais jamais Hydro-Québec n'a convenu de ce tarif», a-t-il dit. Du reste, «le tarif de 3,6 cents n'était certainement pas fondé. [...] Ce n'est pas réaliste».

Hypothèse de travail

Si son projet se concrétise, Adriana devra payer un tarif «beaucoup plus élevé», puisque sa mine se situerait «très loin d'un quelconque barrage et du réseau de transmission». «Depuis que le prospectus a été déposé», le 13 avril 2011, «sachez que l'action est passée de 2 dollars à 1dollar, sachez que la valeur d'Adriana, c'est moins de 200 millions de capitalisation boursière pour un projet de 12 milliards. Il y a bien des investisseurs qui savent très bien qu'il y a beaucoup d'hypothèses de travail dans ce dossier et qu'il y a loin de la coupe aux lèvres», a expliqué Clément Gignac.

La société Adriana Resources a confirmé à La Presse que le coût de 3,6 cents utilisé dans l'évaluation économique préliminaire du projet Otelnuk était une hypothèse de travail avancée par l'entreprise, et non par Hydro-Québec, il y a plus de deux ans et demi. Après avoir discuté avec le PDG d'Adriana, une porte-parole de l'entreprise, Marie-Claude Lavigne, a indiqué que la donnée est aujourd'hui caduque et que la société s'attend à payer un coût plus élevé si le projet va de l'avant.

- Avec la collaboration d'Hugo Fontaine