Un groupe de la communauté juive orthodoxe lance plusieurs critiques contre le projet de loi qui obligerait une musulmane à retirer son niqab pour recevoir des services publics. Certaines dispositions pourraient être inconstitutionnelles, selon lui.

Mercredi, pour la toute première fois, des représentants de cette communauté ont témoigné devant une commission parlementaire à l'Assemblée nationale. Le Conseil orthodoxe juif pour les relations communautaires du Québec (COJRCQ) a plaidé que le projet de loi 94 crée une «hiérarchisation des droits» en indiquant que «tout accommodement doit respecter la Charte des droits et libertés de la personne, notamment le droit à l'égalité entre les hommes et les femmes». Le gouvernement privilégie le droit à l'égalité au détriment de la liberté de religion, une hiérarchisation qui «vient se heurter aux jugements de la Cour suprême», estime le conseiller juridique du COJRCQ, Lionel Perez.

Si le projet de loi est adopté, le COJRCQ craint que la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) cesse de consentir un accommodement aux juifs orthodoxes qui, pour des motifs religieux, demandent qu'un homme et non une femme leur fasse passer un examen de conduite. La Commission des droits de la personne a pourtant démontré le bien-fondé de cet accommodement, rappelle-t-il.

Lionel Perez a émis des «réserves profondes» au sujet de l'article 6 du projet de loi. Tout citoyen qui reçoit ou donne un service public doit avoir le «visage découvert lors de la prestation des services», stipule cet article. L'État pourrait refuser un accommodement à une musulmane portant le niqab si des motifs liés, entre autres, à la «communication» le justifient. Or, cette disposition risque d'enfreindre la liberté de religion garantie par les chartes, dit M. Perez.

Dans son mémoire, le COJRCQ souligne que l'article 6 ne réfère à aucune religion en particulier, mais «il reste qu'il aurait un effet particulièrement lourd sur ceux qui portent le voile». «L'effet néfaste pour les pratiquants d'une religion suffit pour soulever une question d'inconstitutionnalité», indique-t-il.