Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, estime que les États-Unis auraient tout intérêt à reconnaître rapidement un Québec indépendant après un vote des Québécois en faveur de la souveraineté.

Dans un discours prononcé hier à Washington devant les membres de deux groupes de réflexion, M. Duceppe a soutenu que ce n'est qu'une question temps avant que le Parti québécois reprenne le pouvoir et demande à nouveau aux Québécois de se prononcer sur leur avenir dans la fédération canadienne.

L'impopularité du gouvernement libéral de Jean Charest augmente les chances d'une victoire du Parti québécois aux prochaines élections, a-t-il affirmé.

Ne pas intervenir

Il a bon espoir que l'option souverainiste remportera la victoire à cette troisième consultation. Il a invité les autorités américaines à ne pas intervenir directement ou indirectement dans le prochain débat référendaire.

«Ce que nous attendons du gouvernement des États-Unis, c'est bien sûr, dans un premier temps, qu'il n'y ait aucune intervention dans notre politique intérieure au moment où les Québécois prendront leur propre décision», a affirmé le chef bloquiste aux membres du Woodrow Wilson International Center for Scholars et du Hudson Institute.

Au dernier référendum, en 1995, l'ancien président des États-Unis, le démocrate Bill Clinton, avait affirmé qu'un «Canada fort et uni» était «un merveilleux partenaire pour les États-Unis».

«Dans un deuxième temps, je compte sur les États-Unis pour être un acteur déterminant en cas de victoire du oui à un référendum - celui qui pousse à la négociation et à la résolution rapide et ordonnée du conflit politique Canada-Québec», a ajouté M. Duceppe.

«Chacun d'entre nous - Québec, Canada et États-Unis - avons d'énormes intérêts économiques en jeu et nous aurons tous intérêt à régler cette situation politique rapidement et de façon ordonnée», a-t-il encore dit.

Dans son discours bien étoffé, M. Duceppe a rappelé que le Québec avait fait pencher la balance en faveur de l'adoption de l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis aux élections fédérales de 1988.

Il a aussi souligné que le Québec exporte davantage vers les États-Unis que vers le reste du Canada. En 2008, par exemple, la valeur des exportations du Québec vers les États-Unis frisait les 51 milliards de dollars alors qu'elle était de 31 milliards de dollars dans le reste du Canada.

«Une chose est certaine: pour un Québec souverain, la relation avec les États-Unis sera assurément la plus importante de notre politique étrangère. Nous pourrons alors discuter beaucoup plus directement avec vous. Aujourd'hui, les États-Unis ont un allié très solide avec le Canada. Si le Québec devient un pays souverain, les États-Unis auront deux alliés très solides pour le prix d'un», a affirmé le chef bloquiste.

M. Duceppe a toutefois précisé qu'un Québec souverain continuera de défendre la gestion de l'offre, comme le fait actuellement le Canada. «Pour un Québec souverain, ce sera sans doute la principale bataille en matière commerciale», a-t-il dit.

Politique étrangèred'un Québec souverain

M. Duceppe a donné quelques détails de ce que pourrait être la politique étrangère d'un Québec indépendant:

> Le Québec aurait sa propre armée et prendrait «ses responsabilités».

> Un Québec indépendant «aurait certainement participé» à l'opération militaire en Afghanistan qui a suivi les attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis.

> Un Québec souverain pourrait oeuvrer efficacement dans des pays francophones comme Haïti ou en Afrique.

> Le Québec pourrait devenir spécialiste en reconstruction après les conflits ou les catastrophes.

> En matière de lutte contre les changements climatiques, le Québec militerait pour l'adoption d'un tarif sur les importations de produits polluants en provenance de pays qui ne limitent par leurs émissions de GES.

M. Duceppe a aussi souligné que le Québec et le Canada ont des divergences d'opinions importantes quant aux efforts qu'il faut déployer pour contrer les changements climatiques.

«Le Québec sera un acteur responsable sur la scène internationale», a dit M. Duceppe.

Des critiques

Le député conservateur Steven Blaney a vertement critiqué la décision du chef bloquiste de se rendre dans la capitale américaine afin de parler de la souveraineté du Québec. Il a affirmé que le chef bloquiste avait «vraiment du temps à perdre» et qu'il ferait mieux de s'occuper de la situation économique au pays plutôt que d'aller «faire le fanfaron aux États-Unis».

- Avec La Presse Canadienne