Le gouvernement devrait adopter le bâillon pour une partie seulement du projet de loi 103 sur les écoles passerelles, soit la plus controversée, celle qui répond directement au jugement de la Cour suprême qui rendra caduque la Loi 104 samedi prochain.

Vendredi matin, le premier ministre Charest a demandé par écrit au président de l'Assemblée nationale de convoquer la Chambre lundi à 9h. Une «motion de procédure d'exception» (communément appelée «bâillon») sera alors adoptée. Les députés ne disposeront que de 14 heures pour débattre.

Dans sa lettre, M. Charest indique que la mesure permettra «la présentation d'un projet de loi faisant suite aux décisions juridiques en matière de langue d'enseignement». Or, pour un bâillon, on parle habituellement de «compléter» une présentation.

De plus, le projet de loi 103 ne répond pas seulement à la «décision juridique» sur la langue d'enseignement. Il s'attaque à plusieurs autres sujets.

Parmi les mesures qu'il prévoit: les cégeps et universités devront diffuser leur politique linguistique et faire rapport à la ministre, qui peut exiger des corrections. La ministre pourra aussi forcer les organismes municipaux à se doter d'une politique linguistique et à en faire périodiquement rapport à l'Office québécois de la langue française (OQLF).

En outre, on ajouterait au préambule de la Charte québécoise des droits et libertés la phrase suivante: «Considérant que le français est la langue officielle du Québec et qu'il constitue un élément fondamental de son patrimoine culturel et de sa cohésion sociale». Le projet de loi 103 prévoit également des sanctions pour les écoles qui essaieront de servir de passerelle vers le réseau anglophone public.

Bâillon partiel

Selon nos sources, le gouvernement n'utilisera le bâillon que pour les éléments du projet de loi 103 qui rempliront le vide juridique laissé par la mort de la loi 104 - celle qui interdisait les écoles passerelles. La nouvelle loi permettra à un francophone ou à un allophone de fréquenter le réseau public anglais à condition d'avoir séjourné trois ans dans une école non subventionnée et d'avoir un parcours jugé «authentique».

Les autres éléments du projet de loi 103 devraient suivre leur parcours législatif normal, sans bâillon. La ministre a toutefois refusé de le confirmer vendredi. «Il y a urgence pour régler la question des écoles passerelles avant le 23 octobre», s'est bornée à dire son attachée de presse, Valérie Rodrigue.

Le leader parlementaire du PQ, Stéphane Bédard, ne se réjouit pas de cette éventualité: «L'élément dont on voulait débattre, c'est celui sur les écoles passerelles», regrette-t-il. Selon le député péquiste, le gouvernement «improvise». «Ils ont attendu la dernière minute pour présenter leur projet de loi, et maintenant ils plaident l'urgence. Mais on ne peut pas plaider sa propre turpitude.»