La vie dans les cabinets politiques est si intense que, pendant des années, les employés ne prennent pas les vacances auxquelles ils ont droit. À leur départ, on leur verse, rubis sur l'ongle, des compensations très importantes à même les fonds publics.

Vétéran des officines libérales, Jean-Philippe Marois, chef de cabinet de la ministre de la Justice, Kathleen Weil, a été nommé en décembre 2009 secrétaire général associé au conseil exécutif, une nomination du conseil des ministres.

À sa nomination, M. Marois a obtenu pour ses jours de vacances accumulées un total de 84 000 $, comme s'il n'avait pas pris de vacances pendant huit ans. Il a aussi obtenu 14 000 $ pour des congés de maladie non réclamés (payés à 50%) et 10 000 $ en indemnité de départ, même s'il avait profité d'une nomination gouvernementale.

M. Marois n'a pas rappelé La Presse, hier. Avant de passer à la Justice, M. Marois avait été longtemps le bras droit de Jean-Marc Fournier aux Affaires municipales, puis à l'Éducation et au Revenu.

La Presse a invoqué la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir les conditions de travail et de cessation d'emploi de l'ensemble des chefs de cabinet ministériel du gouvernement Charest. Ces données, encore partielles, démontrent une réalité bien connue dans les officines politiques : les employés ne déclarent pas nécessairement les jours de vacances qu'ils prennent.

Selon le porte-parole du premier ministre Charest, Hugo D'Amour, le cas de M. Marois s'explique facilement : comme il est employé politique depuis plus de 15 ans, s'il n'a pris qu'une partie de ses vacances annuelles, l'accumulation peut facilement atteindre 84 000 $. Les employés politiques, comme les professionnels du gouvernement, ont droit à quatre semaines de vacances par année.

Au début des années 90, le départ d'un employé du gouvernement Bourassa, Mario Simard, avait fait les manchettes pour les mêmes raisons. Son patron, le ministre Albert Côté, lui avait versé une indemnité de départ de 150 000 $ même si M. Simard avait été nommé chez Rexfor, une société d'État.

Québec lui avait payé 50 000 $ pour une centaine de jours de vacances qu'il avait réclamés en quittant son poste politique. Le gouvernement avait tenté de récupérer 44 000 $ par une poursuite judiciaire, mais il avait finalement jeté l'éponge, ne pouvant prouver que M. Simard avait tout de même pris les vacances qu'il réclamait.

Dans le cas de Philippe Dubuisson, le chef de cabinet de Monique Jérôme-Forget, qui a quitté son poste avec sa patronne au printemps 2009, le gouvernement a payé 56 000 $ en jours de vacances accumulées.

Ce versement s'ajoutait à une indemnité de départ de 150 000 $ parce que M. Dubuisson n'avait pas profité d'une autre nomination au gouvernement - il a fait quelques jours à l'Autorité des marchés financiers, mais a préféré partir et conserver cette indemnité de départ. Il a aussi reçu un «bonus» de 8000 $.

Au cabinet de M. Charest, on précise toutefois que les 150 000 $ désignés comme «salaire» dans le tableau fourni par le ministère des Finances représentent son traitement annuel pour 2009. Il a été payé au prorata des semaines travaillées.

En outre, les employés politiques n'ont aucune rémunération pour les heures supplémentaires, rappelle le responsable de l'accès à l'information du ministère des Finances, Patrice Gagnon.

Alexandre Bibeau, chef de cabinet de David Whissell lorsqu'il était ministre du Travail, est parti avec 30 000 $, l'équivalent de 67 jours de vacances accumulés. «Il ne prenait que deux semaines de vacances par année alors qu'il avait droit à un mois», a expliqué son père, Pierre Bibeau, vice-président de Loto-Québec et conseiller écouté de Robert Bourassa et de Jean Charest. Alexandre Bibeau était depuis huit ans dans les cabinets politiques à Québec, ajoute-t-il.

- Avec la collaboration de William Leclerc