Jean Charest demande aux décideurs économiques et financiers de répondre à une série de questions sur des enjeux déterminants pour le Québec, comme le vieillissement de la population. Le premier ministre veut aussi des conseils pour engager le Québec sur «la voie d'une prospérité durable» dans les années à venir. Il propose par exemple que le Québec se donne comme objectif de devenir «la première société en Amérique du Nord à électrifier son parc automobile et ses transports publics».

Hier soir à Lévis, Jean Charest a donné le coup d'envoi de sa «rencontre économique» devant une centaine d'invités, surtout des gens d'affaires, mais aussi des maires et des chefs syndicaux.

 

Dans son discours de 50 minutes, le seul événement de la soirée, M.Charest leur a demandé de répondre à «deux questions principales» au cours des ateliers qui se tiendront aujourd'hui.

«À court terme, quels gestes doivent être posés pour que le Québec profite pleinement de la reprise? a-t-il affirmé. Et à moyen terme, comment pouvons-nous placer le Québec sur la voie d'une prospérité durable pour les 10 ou 20 prochaines années?» Le premier ministre a sa propre idée sur le sujet. «On pourrait se donner comme objectif de devenir la première société en Amérique du Nord à électrifier son parc automobile et ses transports publics», a-t-il dit.

Profiter de la reprise

Selon Jean Charest, le Québec traverse la crise économique «avec succès», notamment parce que le gouvernement a écouté les conseils des décideurs financiers et économiques. «Aujourd'hui, je refais appel à vous pour engager fermement le Québec dans la reprise», a-t-il lancé.

Jean Charest a rappelé que le Québec fait face à «des défis qu'il nous faudra maîtriser», comme le vieillissement de la population qui est plus préoccupant qu'ailleurs. Il demande à ses invités de lui proposer des mesures afin d'«encourager les travailleurs de plus de 55 ans à rester au travail s'ils en ont encore envie». Il est également à la recherche de moyens pour «attirer des travailleurs qualifiés, autant des titulaires de professions que des gens de métier».

Pour lutter contre le décrochage scolaire, M. Charest demande aux participants de lui suggérer des «gestes afin de mieux arrimer nos programmes de formation générale, de formation professionnelle et de formation technique aux besoins du marché du travail».

Le premier ministre veut profiter de la reprise pour «créer plus de richesse». «Quels sont les domaines sur lesquels nous devons miser pour assurer la prospérité du Québec et de toutes ses régions?» a-t-il demandé aux participants.

Comme prévu, Jean Charest a effleuré la question des finances publiques. Le gouvernement devra prendre des «décisions difficiles» dans le but de retrouver l'équilibre budgétaire, a-t-il prévenu. Mais ces décisions ne doivent pas devenir les «problèmes de demain». Dans le passé, «des décisions qui ont pu entraîner des économies à court terme ont entraîné des problèmes graves à moyen terme. Nous sommes ensemble pour éviter la répétition de ce scénario», a-t-il affirmé dans une allusion aux mises à pied de médecins et d'infirmières du gouvernement Bouchard pour atteindre le déficit zéro.

Pour le ministre des Finances Raymond Bachand, les occasions où les grands spécialistes économiques, les milieux financiers et les centrales syndicales se retrouvent pour discuter d'économie sont rarissimes. «Ces gens-là ne sont jamais tous ensemble. C'est aujourd'hui pour la première fois», a-t-il dit.

Selon Claudette Carbonneau, «on pourra mesurer le sérieux de l'exercices'il y a un comité de suivi après. Autrement c'est parle, parle, jase, jase». Pour elle, ce n'est pas l'endroit de discuter de finances publiques. «Ce débat est pertinent mais ce n'est pas toute la société qui est représentée ici.»

Le président de la CSQ, Réjean Parent, estime que la rencontre économique n'est qu'un «exercice de distraction» auquel il participe seulement «par politesse» et parce que sa centrale est membre de la Commission des partenaires du marché du travail.

Le président de BMO, Jacques Ménard, considère plutôt que l'exercice est «stimulant» et «nécessaire» si l'on veut une «vision commune du développement à long terme». Le président de la Caisse de dépôt, Michael Sabia, juge que «ce forum est une très bonne occasion de discuter» et «d'échanger des idées» en vue de profiter de la reprise économique.

Une centaine de membres de la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics - issus du Front commun des assistés sociaux et de la Fédération des femmes par exemple - ont manifesté à l'extérieur du centre des congrès de Lévis.

 

Et la santé ?

La rencontre convoquée par le gouvernement Charest reste un «exercice de futurologie proche du surréalisme», a estimé le président de la Fédération des médecins spécialistes, Gaétan Barrette. «C'est pour le moins ordinaire que le secteur de la santé ne soit pas représenté à cette rencontre.» La Fédération a demandé une place, «mais on nous a poliment fait savoir qu'on n'était pas attendus», a-t-il dit. Il a du mal à comprendre que la santé, qui représente la moitié des dépenses du gouvernement, ne soit pas à l'ordre du jour. «La santé est un mégasecteur générateur d'emplois, un moteur économique. On considère la santé comme une dépense, un problème, et non comme un acteur important de la société. C'est insultant!» a-t-il insisté.