Le gouvernement Harper songe plus que jamais à faire une croix sur l'achat de 65 avions furtifs F-35. En cause: les dépassements de coûts substantiels liés à l'achat et à l'entretien de ces appareils devant remplacer la flotte vieillissante des CF-18 d'ici 2020.

La ministre des Travaux publics Rona Ambrose qui avait déjà évoqué l'idée qu'Ottawa puisse acheter un autre modèle d'avion en octobre, doit rendre public, au plus tard la semaine prochaine, un rapport de KPMG démontrant une autre hausse importante des coûts de ces appareils.

Selon des informations diffusées hier soir par certains médias, la facture pourrait atteindre les 40 milliards, selon les calculs de KPMG, soit 15 milliards de plus que ce qu'avait estimé le vérificateur général Michael Ferguson dans un rapport accablant déposé à la Chambre des communes au printemps.

Le rapport du vérificateur

Tandis que le gouvernement Harper tente d'éliminer un déficit de 26 milliards de dollars au plus tard en 2015, soit avant les prochaines élections, l'achat de ces avions serait difficilement justifiable auprès des Canadiens en période d'austérité budgétaire. Car tout indique que le ministre des Finances Jim Flaherty devra imposer de nouvelles compressions dans son prochain budget s'il veut réussir à rétablir l'équilibre budgétaire d'ici deux ans et demi.

Dans son rapport, Michael Ferguson avait démontré que le ministère de la Défense avait sous-estimé les coûts d'achat et d'entretien des F-35 de quelque 10 milliards. M. Ferguson évaluait donc à au moins 25 milliards les coûts d'acquisition et d'entretien de ces fameux avions qui doivent être construits par la firme américaine Lockheed Martin.

Dans la foulée de ce rapport, le gouvernement Harper a confié à la firme comptable KPMG, au mois de septembre, le mandat d'analyser les coûts associés au programme de chasseur furtif F-35 pour la somme d'environ 706 000$. Or, la société a remis son rapport à la ministre Ambrose il y a quelques semaines et les conclusions de KPMG auraient semé de sérieux doutes au sein du cabinet sur la pertinence d'acheter ces avions.

La ministre Ambrose doit déposer ce rapport à la Chambre des communes avant la fin des travaux parlementaires, prévue jeudi prochain, a indiqué hier soir son attaché de presse Michael Bolkenius,

«Le gouvernement a reçu le rapport de KPMG et est en train de l'étudier. Le gouvernement va faire une mise à jour de ce dossier avant la fin des travaux de la Chambre. Nous sommes déterminés à mettre en oeuvre notre plan en sept points et d'aller de l'avant avec un plan transparent pour remplacer la flotte vieillissante des CF-18», a indiqué M. Bolkenius.

Un des éléments de ce plan est de ne pas consacrer plus de 9 milliards de dollars à l'achat des appareils. Les autres éléments visent à valider les coûts et à évaluer d'autres options.

À la suite du rapport de Michael Ferguson, le gouvernement Harper a aussi mis sur pied le Secrétariat national d'approvisionnement en chasseurs. Son mandat est non seulement d'examiner les coûts d'achat des avions F-35, mais aussi d'évaluer si un autre appareil peut répondre aux besoins des Forces canadiennes.

Ce secrétariat est composé de sous-ministres et de l'ancien vérificateur général Denis Desautels. Le ministère de la Défense, qui tient mordicus aux F-35, s'est ainsi vu retirer tout rôle prépondérant dans ce dossier.

Les quotidiens de la chaîne Postmedia ont rapporté hier soir que le gouvernement Harper a d'ores et déjà décidé de se retirer du projet d'achat des F-35 après avoir pris connaissance des conclusions de la firme KPMG.

Nouvel appel d'offres

Un comité du cabinet aurait pris la décision mardi soir de reprendre le projet de remplacement des CF-18 au début et de lancer un nouvel appel d'offres. Mais le directeur des communications du premier ministre Stephen Harper, Andrew McDougall, a nié ces informations hier soir sur son compte Tweeter. «Le cabinet n'a pas pris de décision au sujet des F-35. Le gouvernement compte respecter son plan en sept points», a-t-il fait savoir.

Le Canada participe depuis 1997 au programme de conception et de construction des F-35, également connu sous le nom de Joint Strike Fighter, avec huit autres pays (États-Unis, Grande-Bretagne, Danemark, Norvège, Italie, Australie, Turquie et Pays-Bas) Le Canada a investi jusqu'ici 200 millions dans ce programme.