À la veille du vote sur une motion concernant le statut juridique du foetus aux Communes, les néo-démocrates reprochent à Stephen Harper de laisser à ses ministres et députés le loisir de voter comme bon leur semble.

Le ministre de l'Immigration Jason Kenney a annoncé lundi qu'il allait voter en faveur de la motion M-312, qui créerait un comité chargé de renseigner le Parlement sur le moment où un foetus devient un «être humain».

L'instigateur de cette motion, le député conservateur d'arrière-ban Stephen Woodworth, convient lui-même qu'elle pourrait mener à la réouverture du débat sur le droit à l'avortement au pays.

Or Stephen Harper avait spécifiquement promis en campagne électorale de ne pas ouvrir le débat, ont rappelé les députés du Nouveau Parti démocratique, mardi.

Dans ces circonstances, la porte-parole néo-démocrate en matière de justice, Françoise Boivin, a confié rester «songeuse» devant la décision d'un ministre d'influence comme M. Kenney de prendre une position inverse à celle de son chef.

Selon Mme Boivin, si M. Harper ne pouvait empêcher son député de présenter sa motion, il aurait néanmoins pu imposer la ligne de parti lors du vote.

«J'ai hâte de voir combien de gens sont prêts à défier le premier ministre dans un contexte comme celui-là. Mais c'est la règle de jeu qu'il a lui-même (fixée) en refusant d'imposer une ligne de parti dans ce dossier-là», a noté Mme Boivin.

Dans les rangs conservateurs, certains trouvent également qu'ils doivent s'en tenir à leur engagement électoral de ne pas ouvrir une telle boîte de Pandore.

«Moi, je trouve que l'engagement que nous avons pris envers les Québécois et les Canadiens est très important, est c'est pour ça que je veux le respecter», a fait valoir le ministre d'État à la Petite entreprise et Tourisme, Maxime Bernier. Sans aller jusqu'à lancer la pierre à son collègue Jason Kenney, M. Bernier a admis qu'il a d'autres priorités que les siennes.

«Pour moi, ce qui prime, ce qui est important, c'est de tenir un engagement électoral. Pour d'autres, ceux-ci ont d'autres idées. Mais l'important c'est que la Chambre va se prononcer», a noté M. Bernier.

Mais selon M. Woodworth, les conservateurs ne renient en rien un engagement électoral en permettant un vote libre sur M-312.

«À ma connaissance, le premier ministre a promis que le gouvernement ne rouvrirait pas le débat sur l'avortement. En aucun temps le premier ministre n'a promis d'abroger la politique du Parti conservateur permettant aux membres de voter selon leurs convictions sur les mesures d'initiative privée», a répliqué le député de Kitchener-Centre.

Le premier ministre a confirmé qu'il allait personnellement voter contre cette initiative, mercredi, et son whip Gordon O'Connor a livré lors des débats sur le sujet un clair plaidoyer en faveur du droit de femmes de disposer de leur corps.

Tous les députés néo-démocrates et bloquistes voteront contre M-312, alors que les libéraux, comme les conservateurs, voteront de façon libre. La motion a malgré tout peu de chance d'être adoptée, de l'aveu même de M. Woodworth.