Le Québec est-il en train de prendre le contrôle du NPD, un parti fédéraliste social-démocrate qui avait peu de racines dans la province il y a un an à peine?

La question se pose avec plus d'acuité depuis l'élection du député d'Outremont Thomas Mulcair à la tête du NPD, il y a deux semaines.

Le nouveau chef s'installe progressivement aux commandes de sa formation politique depuis sa victoire à Toronto le 24 mars. Déjà, les Québécois sont omniprésents dans son entourage et occupent des postes névralgiques. Les 58 députés néo-démocrates du Québec sont loin d'être orphelins dans leur parti.

Nominations

Dans les derniers jours, M. Mulcair a procédé à des nominations qui en disent long sur la place qu'occupent désormais les Québécois dans ce parti fondé le 3 août 1961.

Raoul Gebert, président de la section québécoise du NPD et directeur de la campagne de Thomas Mulcair, deviendra le chef de cabinet du leader de l'opposition officielle. Il succédera à Anne McGrath, qui était chef de cabinet de Jack Layton et qui a conservé son poste pendant le règne intérimaire de Nycole Turmel. Elle a aussi assuré la transition après la victoire de M. Mulcair.

Karl Bélanger, l'attaché de presse principal de Jack Layton à son arrivée sur la scène fédérale en 2003 et qui a donné un coup de main à Mme Turmel, se voit accorder une promotion et devient secrétaire principal. Ce poste était auparavant occupé par Brad Lavigne.

Chantale Turgeon, attachée de presse de longue date de Thomas Mulcair, prend aussi du galon: elle devient chef de cabinet adjointe. Steve Moran, militant de longue date du NPD au Québec, qui était chef de cabinet du leader parlementaire, agira également à titre de chef de cabinet adjoint.

On note aussi Marc-André Viau, attaché de presse du caucus national, et Youssef Amane, attaché de presse responsable du caucus du Québec.

D'anciens journalistes ont décidé de grossir les rangs du NPD dans les derniers mois. Il s'agit de Karine Fortin, qui a travaillé pour La Presse Canadienne à Ottawa et à Montréal, ainsi que de Valérie Dufour et David Patry, deux anciens reporters du Journal de Montréal.

La directrice nationale du NPD, Chantale Vallerand, vient aussi du Québec, tandis que la présidente du parti, Rebecca Blaikie, originaire de Winnipeg, parfaitement bilingue et fille de l'ancien député fédéral Bill Blaikie, a fait ses études à Montréal et a porté les couleurs du NPD contre Paul Martin dans La Salle-Émard aux élections de 2004.

La sortie de Denis Coderre

«On ne peut certainement pas accuser le NPD d'être dirigé de Toronto», a lancé un stratège néo-démocrate, en référence à une déclaration du député libéral Denis Coderre lorsqu'il a démissionné de son poste de lieutenant politique en septembre 2009.

M. Coderre avait quitté son poste avec fracas parce que le chef libéral de l'époque, Michael Ignatieff, avait annulé sa décision de nommer une femme d'affaires comme candidate libérale dans Outremont et de bloquer ainsi le retour en politique de Martin Cauchon dans cette circonscription qu'il avait représentée aux Communes de 1993 à 2004.

M. Coderre avait alors soutenu que les conseillers de Michael Ignatieff à Toronto tentaient de diriger l'aile québécoise du Parti libéral.

«Trop souvent, les partis fédéralistes ont tenu les Québécois pour acquis. Le NPD ne fera pas cette erreur. Nous ne sommes pas ici pour jouer les francophones de service», a ajouté le stratège, qui milite au NPD depuis plusieurs années.

La vague orange qui a déferlé sur le Québec au dernier scrutin a permis de faire élire un nombre record de 59 députés néo-démocrates dans la province (il en reste 58 depuis la défection de Lise Saint-Denis, passée au Parti libéral en janvier). Les députés du Québec représentent 60% du caucus du NPD.

Cette vague a marqué le début d'un réalignement politique qui continue d'avoir des conséquences importantes à Ottawa.