Les trois partis fédéraux rejettent la demande du Bloc québécois visant à obtenir un siège aux comités de la Chambre des communes qui étudieront le dossier de l'utilisation des fonds parlementaires par Gilles Duceppe.

Le chef bloquiste Daniel Paillé a réitéré cette demande, hier, dans une entrevue accordée à La Presse durant laquelle il a défendu son prédécesseur avec plus de fermeté que lors des derniers jours.

Mais le Parti conservateur, le Nouveau Parti démocratique et le Parti libéral se sont montrés peu enclins à accorder un tel privilège au Bloc. Seuls les partis reconnus par la Chambre des communes peuvent siéger aux comités parlementaires ou au Bureau de la régie interne, qui établit et fait respecter les règlements de la Chambre. Un parti doit avoir au moins 12 députés pour être ainsi reconnu.

Changer les règles? Pas question

«Pour faire cela, il faudrait qu'on change les règles», a souligné Joe Comartin, député néo-démocrate et porte-parole du Bureau de régie interne. Il a souligné le risque de créer un précédent à cet égard. «Et le Bloc a fait la même chose quand le NPD avait seulement neuf députés [entre 1993 et 1997]: ils ont refusé de nous laisser siéger aux comités permanents.»

Le Bureau de la régie interne doit se rencontrer lundi matin afin de discuter du mode de rémunération du directeur général du Bloc québécois au cours des dernières années. M. Comartin doute qu'une décision soit rendue le jour même.

La Presse a révélé que le directeur général était payé à même les fonds accordés par la Chambre des communes à Gilles Duceppe pour le fonctionnement de son bureau parlementaire. Une telle pratique violerait les règles de la Chambre, telles qu'interprétées par tous les experts interrogés par La Presse et les autres partis à la Chambre des communes.

Un tel budget, en effet, est destiné à des fins parlementaires, et non pour financer les activités d'un parti. Bien que le règlement prévoie que les «fonctions parlementaires» puissent inclure des «questions partisanes», le Parti conservateur, le Parti libéral et le NPD affirment avoir interprété cette règle de manière restrictive par le passé - à tout le moins, en ce qui concerne la rémunération de leur directeur général.

Le député bloquiste André Bellavance a réitéré que le Bloc doit avoir voix au chapitre afin de défendre la position du parti et de Gilles Duceppe. En entrevue à La Presse, il a indiqué que l'interprétation des règles faite par le Bloc québécois donnerait le feu vert à Stephen Harper pour payer le directeur général du Parti conservateur à même le budget de fonctionnement du bureau du premier ministre. Le chef libéral Bob Rae pourrait en faire autant - ce qui pourrait être avantageux étant donné que les coffres du Parti libéral sont peu garnis -, et le prochain chef du NPD pourrait aussi payer de cette façon le salaire du directeur général de son parti.

«Cela respecte les règles. Pour nous, ce n'est pas problématique. Maintenant, il y a des questions à se poser pour tout le monde», a dit M. Bellavance, faisant allusion au cas d'un adjoint du ministre de l'Immigration, Jason Kenney, qui sillonne la circonscription du député libéral Irwin Cutler pour le déstabiliser.

Mais le chef bloquiste Daniel Paillé est moins catégorique. «Est-ce qu'on peut comparer l'ouvrage du directeur d'un parti avec celui d'un autre parti? Peut-être qu'ils ont le même titre, mais peut-être qu'ils ont des tâches différentes», a-t-il dit.

Défense plus ferme de Paillé

En entrevue à La Presse, M. Paillé a par ailleurs paru défendre son prédécesseur avec plus de vigueur que lors des derniers jours.

«On va tout faire pour défendre l'intégrité jamais mise en doute de M. Duceppe», a-t-il déclaré.

Pourtant, samedi, M. Paillé avait refusé de commenter la nouvelle sur l'utilisation de fonds parlementaires pour payer le directeur général du parti. Puis, lundi, il a affirmé que ce serait à M. Duceppe lui-même de justifier l'utilisation de son budget des Communes.

«Comme député, j'avais à respecter le fait que les travaux parlementaires étaient séparés des travaux partisans, avait-il expliqué quand on l'a interrogé sur son interprétation des règles. Est-ce que, au niveau du chef de parti, il y avait d'autres règles? Je ne sais pas.»

«Ce que l'on voit, nous, en regardant le dossier, a-t-il précisé hier, ça nous semble évident que M. Duceppe a géré de manière parfaite ses argents qui venaient comme parlementaire à Ottawa.»