Le premier ministre Stephen Harper était tout sourire, mercredi, au moment d'accueillir pour la première fois au parlement son nouveau caucus élargi qui lui a permis de décrocher une majorité aux dernières élections.

Mais si ses troupes se réjouissent de ce résultat électoral, les députés et sénateurs conservateurs du Québec, eux, doivent composer avec la grogne de militants de la Belle Province qui s'inquiètent de leur place dans la formation politique.

Un sentiment tellement profond que, impatients de mener une réflexion sur les résultats désastreux du dernier scrutin, des conservateurs québécois ont choisi de tenir une réunion entre eux, mercredi soir à Montréal, fatigués d'attendre que leurs compatriotes d'Ottawa se joignent à eux pour le faire.

Et les députés québécois qui ont réussi à se faire réélire, malgré la vague orange qui a déferlé sur le Québec le 2 mai dernier, n'avaient pas l'air de s'en formaliser. Des quatre élus rencontrés en marge de la réunion de leur caucus, mercredi, aucun n'a l'intention de participer à la réunion de Montréal.

«Je suis à Ottawa présentement, donc je ne serai pas à Montréal», a rétorqué le député de Beauce, Maxime Bernier, qui ne fera pas le trajet de 200 km pour y participer.

«Pour moi la réunion importante c'est le caucus aujourd'hui puis la reprise des travaux parlementaires», a quant à lui répliqué Steven Blaney, de Lévis.

En entrevue avec La Presse Canadienne, des conservateurs québécois ont admis cette semaine s'être sentis abandonnés lors de la dernière campagne électorale fédérale, qui a mené à l'élection d'un gouvernement conservateur majoritaire début mai. Les conservateurs n'ont réchappé que cinq des 11 sièges qu'ils détenaient avant la campagne électorale.

Et frustrés par le manque de soutien de leur parti, certains ont prévu tenir une réunion non autorisée à Montréal mercredi soir, en marge du congrès national conservateur prévu la semaine prochaine. Selon les organisateurs du congrès, moins de 100 militants du Québec auraient l'intention d'y participer.

Les députés québécois ont assuré que l'autopsie réclamée par les militants déçus se ferait, mais au sein du caucus québécois, à Ottawa la semaine prochaine.

«C'est des discussions qu'on va avoir à l'interne», a tranché M. Bernier.

Les quatre députés questionnés sur le sujet - Maxime Bernier, Steven Blaney, Denis Lebel et Christian Paradis - ont tous refusé de commenter l'insatisfaction des militants québécois sur le terrain. Le rôle de lieutenant politique pour le Québec de M. Paradis a d'ailleurs été contesté par certains, qui déplorent qu'il conserve son titre malgré les résultats électoraux désastreux du parti dans la province.

Alors que les députés refusent de parler de la nécessité de se pencher sur la dernière campagne, leur compatriote québécois le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu a convenu qu'une autopsie est nécessaire.

«Lorsqu'on passe de 11 députés à cinq, je pense qu'il faut avoir une réflexion sur l'organisation qu'on a menée au Québec, évidemment», a-t-il acquiescé. Mais il est prématuré de contester le leadership de M. Paradis comme lieutenant politique de M. Harper au Québec, a-t-il insisté.

À l'occasion de la première réunion de son caucus, mercredi matin, Stephen Harper en a profité pour présenter ses nouveaux élus aux vétérans conservateurs, ainsi qu'aux médias.

Fort de la majorité qu'il réclamait aux Canadiens depuis des mois, le premier ministre a plaidé que le mandat qu'ont reçu ses troupes, début mai, témoignait du fait que les «valeurs conservatrices sont les valeurs canadiennes et que le Parti conservateur est le parti du Canada».

M. Harper a fait valoir que, tel que promis aux électeurs, son gouvernement se remettait rapidement au travail, en présentant le discours du Trône dès vendredi et en déposant son budget lundi prochain.

«Nous allons respecter le mandat que nous ont donné les Canadiens, rester concentrés sur l'économie, compléter notre reprise et éliminer le déficit. En d'autres mots, poursuivre notre plan pour maintenir les taxes et les impôts bas pour la création d'emplois et la croissance économique», a argué le premier ministre devant ses troupes.