Kenneth Rowland avait 20 ans quand son meilleur ami est mort dans ses bras. C'était en octobre 1944. Sa compagnie de militaires canadiens tentait de libérer la petite ville de Bergen op Zoom, dans le sud-ouest des Pays-Bas.

Jeudi, pour la première fois, M. Rowland est retourné voir la tombe de son ami. William «Billy» Roscoe est enterré dans le cimetière de Bergen op Zoom, où le premier ministre Stephen Harper a participé à une cérémonie commémorant le 65e anniversaire de la libération du pays.Une fois les discours, les prières et les airs de cornemuses terminés, Kenneth Rowland s'est levé de son siège et, accompagné de sa fille, il a marché lentement entre les rangées de centaines de petites tombes blanches. Il s'est arrêté devant l'une d'elles, pareille aux autres. «Il est ici!» a lancé l'homme de 85 ans.

Il s'est penché. Il a déposé au pied de la tombe un bouquet de fleurs, un petit drapeau canadien planté au centre. Quand il s'est relevé, il pleurait.

«Je n'ai jamais eu de frère, a-t-il expliqué. Nous sommes entrés dans l'armée ensemble en 1940. Nous avons été amis durant toute la guerre... Jusqu'à ce qu'il soit tué à Bergen op Zoom.»

C'est arrivé le 28 octobre. La petite ville était sur le point d'être libérée. Les soldats canadiens du régiment de Lincoln et Welland, de l'Ontario, étaient positionnés dans une école vacante.

Mais devant une résistance allemande plus tenace que prévu, leur commandant leur a ordonné de dérouler un fil de téléphone dans toute la ville. «Nous en aurons besoin», leur a-t-il expliqué.

Arrivés derrière l'école, ils ont soudain été la cible de tirs de mitrailleuse.

Les premiers sont passés au-dessus de la tête de Kenneth Rowland. Les seconds, plus précis, ont atteint son ami.

«Rapidement, le sergent de la compagnie est arrivé avec sa jeep, s'est souvenu l'ancien combattant. Il s'est mis à crier: «Entrez dans l'auto!»»

«Je l'ai ramassé et j'ai commencé à courir vers la jeep... Mais sa tête s'est renversée vers l'arrière...»

«Il avait un trou dans son cou. Il était mort. Ses yeux ont comme roulé, vous savez... C'est cela.»

Harper ému

Comme M. Rowland, des douzaines d'anciens militaires ont rendu hommage, jeudi, à ceux qui ont combattu et laissé leur vie pour la libération de l'Europe lors de la Seconde Guerre mondiale.

La date de la libération des Pays-Bas était le 5 mai. Celle de la fin de la guerre à proprement parler, le 8. Le premier ministre Stephen Harper était à l'Union européenne pour la première. Il sera à Berlin pour la deuxième.

Cela ne l'a pas empêché de prononcer un vibrant discours en l'honneur des anciens combattants canadiens durant la cérémonie, puis de s'émouvoir, lors d'un point de presse, en évoquant la mort de son père, qui aurait environ l'âge de ces vétérans.

«Il y en a de moins en moins avec nous. Ce sont des jours précieux, alors que nous les avons encore avec nous pour nous raconter leurs histoires», a-t-il dit, les yeux humides.

«Nous nous souviendrons d'eux», avait-il conclu quelques heures plus tôt, en terminant son discours.